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La caution de gauche de la primaire

La recette de Hamon pour gagner la primaire… et sauver le PS

A quelques jours du premier débat entre les candidats de la primaire de gauche, les derniers sondages montrent une poussée importante de Benoit Hamon. L’ancien ministre peut-il créer la surprise lors de la primaire ? Que doit-on attendre de sa candidature ?

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Un créneau électoral qui lui réussit


Les derniers sondages montrent une poussée importante de Benoit Hamon avant la primaire du PS. Celui-ci est désormais estimé à 23% des intentions du vote, juste derrière Arnaud Montebourg à 25%, enregistrant une progression de plus de 11 points en un mois. Il devient donc de plus en plus crédible en tant que candidat du PS lors des prochaines élections présidentielles. D’autant plus lorsqu’on sait que ces derniers mois, avec les résultats du Brexit, la victoire de Trump, ou encore celle de Fillon lors des primaires de la droite, les sondages ont montré qu’ils avaient du mal à prédire le surgissement de nouveaux phénomènes électoraux.

Face à la candidature de Manuel Valls, qui concentre l’impopularité d’un gouvernement qui a mené durant 5 ans une politique profondément antisociale, Benoît Hamon cherche à se positionner sur le créneau des frondeurs. En concurrence directe avec Arnaud Montebourg, il cherche à se délimiter du « projet France » en affichant un discours moins nationaliste et davantage social, autour notamment de sa mesure emblématique d’un revenu universel. Il revendique par exemple se sentir « proche » de Mélenchon sur certains points.

Pour l’instant, cependant, rien n’est fait pour Hamon. Les sondages le donnent toujours largement perdant face à Valls dans un hypothétique second tour et il est probable que les trois prochains débats de la primaire changent largement la physionomie du scrutin.

Derrière les apparences, un programme loin d’être radical


L’ancrage très à gauche choisi par Benoit Hamon dans le cadre de la primaire, ressemble à s’y méprendre à une illusion d’optique si on étudie son programme. Prenons, par exemple, sa mesure phare d’un « revenu universel ». D’abord, il convient de noter qu’il reste largement évasif sur sa mise en application réelle, déclarant « espérer y arriver durant le quinquennat mais ça ne sera ni la première ni la deuxième année ». Dans un premier temps, celui-ci souhaite uniquement généraliser le RSA, autour de 600 euros par mois, aux jeunes de 18-25 ans : une mesure modeste car celui-ci a déjà été étendu aux jeunes ayant déjà travaillé depuis 2010. Et avec 600 euros par mois, il n’y a sûrement pas de quoi vivre décemment pour les 25% de jeunes au chômage !

Quand on creuse sa conception d’un « revenu universel », on a du mal à voir ce qui la distingue de sa version néolibérale qui, à bien y regarder, n’est rien d’autre qu’une mesure d’austérité déguisée. En effet, les 750€ de revenu universel par mois que celui propose remplaceraient à terme les différentes allocations de chômage, de sécurité sociale, etc. qui sont une forme de revenu indirect dépassant la somme avancée [1]. Il confie d’ailleurs avoir un certain nombre de points d’accord avec Emmanuel Macron, notamment sur le fait qu’il faudrait adapter notre modèle à l’avènement de l’ère numérique. Or, pour l’ex-banquier de Rothschild, cette formule n’est rien d’autre qu’un projet pour détruire tous nos acquis sociaux et promouvoir une nouvelle forme d’esclavage moderne. Prétendant vouloir baisser le temps de travail, Hamon se garde bien de vouloir y toucher dans le droit. Pourtant, la seule mesure pour résoudre le problème du chômage, c’est bien le partage du temps de travail entre toutes et tous, sans réduction de salaire.

Sur le reste du programme, ce n’est guère mieux, voire même pire. Son projet de réforme des institutions est par exemple bien maigre. « Limiter » l’utilisation du 49.3 , le cumul des mandats ou encore le recours aux procédures d’urgence, « encadrer » l’utilisation des ordonnances ou encore ajouter une « dose » de proportionnelle : le vocabulaire très timoré en dit long sur la volonté de Hamon de maintenir ce système anti-démocratique en l’état, en l’agrémentant de quelques réformes cosmétiques. Surtout que dans le même temps, celui-ci souhaite renforcer le présidentialisme et retourner au septennat. Sur le plan de la sécurité enfin, le programme de Hamon est carrément réactionnaire. Il souhaite renforcer le « renseignement humain » et la police dans les quartiers populaires, notamment par l’instauration d’une « police des discriminations », tout en maintenant les conditions de légitime défense actuelle. Quand on sait le harcèlement au quotidien pratiqué par la police dans ces quartiers, le contrôle au faciès et les nombreuses violences dont elle se rend coupable, la proposition de laisser la police s’occuper des « discriminations » n’est rien d’autre qu’une sinistre plaisanterie. A l’image de la principale préoccupation de l’intéressé en matière de « sécurité » : celle d’une soi-disant « hostilité à l’égard de la police » qu’il juge « dangereuse ».

Une nouvelle manière de sauver le PS ?


Il est difficile de croire à la posture de celui qui veut renverser la table au sein du PS quand on connait le parcours de l’intéressé. Assistant parlementaire dès 24 ans, président du MJS (Mouvement des Jeunes Socialistes), député européen de 2004 à 2009, porte-parole du PS de 2008 à 2012, puis député depuis 2014, celui-ci est bien un pur produit de l’appareil du PS. On se rappellera également qu’il a été ministre à deux postes différents durant le quinquennat de Hollande, délégué l’Economie sociale et solidaire et de la consommation, puis de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et la Recherche. Un poste où il défendra par exemple la libéralisation du marché de l’optique, une mesure dans le plus pur style néolibéral de son gouvernement. Un passage au gouvernement qui sera notamment remarqué par André Martinez, conseiller spécial de Moscovici qui dira à son propos : « Il m’est arrivé de conseiller à certains chefs d’entreprise d’aller voir Benoît Hamon. Certains, qui étaient parfois sceptiques, sont ressortis ravis de son bureau ».

En définitive, l’objectif de Hamon, c’est bien celui de sauver un appareil du PS en voie de décomposition après un quinquennat où les attaques contre nos droits se sont multipliés. S’il gagne, le « frondeur » explique qu’il s’adressera à Macron et à Mélenchon pour qu’ils rejoignent sa candidature face à la droite dure de Fillon. Pour le PS, avoir un candidat plus à gauche, cela pourrait constituer une bonne manière de se refaire une santé après le quinquennat désastreux de Hollande. Dans le cas où Manuel Valls sortirait vainqueur de la primaire, s’il ne souhaite pas se prononcer sur ce qu’il fera, il fait peu de doute que Hamon rejoindra la candidature de l’ancien premier ministre pour mieux devenir la caution de gauche de sa campagne. Ça ne sera d’ailleurs qu’un bis-repetita : car c’est bien Hamon, avec son acolyte Montebourg, qui ont fait pression dès l’automne 2013 pour remplacer Jean-Marc Ayrault par Manuel Valls au poste de premier ministre, espérant par cette manœuvre pouvoir grappiller quelques concessions. En effet, derrière les « gauches irréconciliables » de Manuel Valls, cette caste politique grassement payée sait toujours trouver des compromis quand il s’agit de sauver le PS, l’un des principaux instruments des contre-réformes exigées par les classes dominantes ces dernières années.

[1] Voir à ce propos notre analyse de l’instauration du revenu universel en Finlande : http://www.revolutionpermanente.fr/Un-revenu-universel-de-800EUR-en-Finlande


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