Au moins 190 Palestiniens auraient perdu la vie des mains des soldats et colons israélien en Cisjordanie depuis le 7 octobre a estimé cette semaine le ministère de la santé palestinien. Un chiffre quasi-équivalent au nombre de palestiniens morts sur les neuf premiers mois de l’année, c’est à dire 208 selon le ministère.

Un chiffre qui jette une lumière crue sur une réalité que nous évoquions déjà le mois dernier : les interventions militaires en Cisjordanie, en parallèle de l’offensive militaire à Gaza et l’accélération de la colonisation dans le territoire, avec son lot de violences. Une situation qui a conduit à vider totalement certains villages comme ceux de Al-Qanub et Wadi Al-Sik.

Dans la continuité, ces derniers jours, plusieurs villes cisjordaniennes ont été le théâtre de tueries perpétrées par l’armée israélienne comme à Tulkarem, où sept Palestiniens ont été tués dans le cadre d’une opération militaire ou encore la mort de quatorze personnes à Jénine jeudi dernier. A Hebron, des soldats israéliens ont tué un chauffeur de taxi de 66 ans, prétextant avoir entendu des tirs, un récit démenti par des témoins présents.

A ces meurtres s’ajoutent des menaces de mort perpétuelles de l’armée et des colons israéliens comme à Susiya, où les routes menant à la ville la plus proche ont été bloquées pour empêcher les habitants de se fournir en nourritures et autres ressources. Les colons israéliens n’hésitent pas non plus à rentrer dans les domiciles des personnes pour y détruire leurs effets personnels.

« Les colons ont désormais les mains libres pour tirer sur des Palestiniens en Cisjordanie »

Dans une interview donnée à LCI ce mardi, même le général Michel Yakovleff, ancien membre de l’OTAN, s’inquiétait de ces « ratonnades » ayant lieu tous les soirs en Cisjordanie, indiquant être préoccupé par ce qu’il considère être un « début de l’épuration ethnique » dans un scénario « à la Bosniaque ».

Une situation que les généraux de l’OTAN, au même titre que les chefs d’États impérialistes, peuvent éventuellement condamner, mais en la déconnectant de l’offensive militaire en cours. Or les deux sont étroitement liées, l’offensive en Cisjordanie étant facilitée par la rhétorique qui fait de tout Palestinien un terroriste. C’est notamment ce qu’exprime le ministre israélien suprémaciste Itamar Ben Gvir qui, après l’attaque sur une policière israélienne la semaine dernière, a déclaré : « tolérance zéro : en cas de doute pas de doute ».

Selon Iyad Haddad, de l’ONG israélienne B’Tselem, « les cas de Palestiniens tués par balle que nous avons examinés prouvent que l’armée israélienne et les colons ont désormais les mains libres pour tirer sur des Palestiniens en Cisjordanie, d’une façon inédite ». En ce sens, l’année 2023 est considérée comme « la plus mortelle » par le journal +972 depuis 2005.

Une politique coloniale de longue date qui s’accélère avec le génocide à Gaza

Les menaces de mort et les assassinats en Cisjordanie ont pris une gravité nouvelle depuis le 7 octobre mais ne sont pas une nouveauté. En effet, depuis le début de l’occupation israélienne en Palestine, les colons ont cherché à déstabiliser la zone en s’attaquant aux Palestiniens, avec notamment des attaques contre les zones agricoles où 800 000 oliviers ont été déracinés depuis 1967. Et il s’agit toujours d’un enjeu pour les colons israéliens qui, selon Yasmeen Al Hassan, membre du Syndicat des comités du travail agricole (Union of Agricultural Work Committees), rendent « les récoltes de plus en plus dangereuses » pour tenter de pousser les Palestiniens à abandonner leurs terres.

Avec le confinement militaire imposé à la Cisjordanie après le 7 octobre, ce sont des milliers de Palestiniens qui sont forcés à vivre dans la peur et sous le coup des menaces constantes l’armée israélienne et des colons qui cherchent à les faire fuir. Ce plan de nettoyage ethnique est conforme aux déclarations des membres de la coalition du gouvernement d’extrême-droite de Netanyahou comme Force Juive qui revendiquent ouvertement un État Israélien « ethniquement pur ».

La radicalisation des attaques des colons et de l’armée israélienne montre l’horreur et la cruauté du colonialisme en Palestine, appuyé par les gouvernements internationaux au nom du droit d’Israël « à se défendre ». La situation en Cisjordanie démontre s’il le fallait combien cet argumentaire est trompeur, et comment Israël tente de profiter de la situation pour avancer dans son projet colonial. À l’heure où des manifestations en soutien au peuple Palestinien mobilisent des milliers de personnes à travers le monde, il est fondamental de continuer à construire un mouvement de solidarité toujours plus important pour stopper l’offensive brutale d’Israël et revendiquer la fin de la situation coloniale en Palestine.