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L’exploitation tue

903 personnes mortes au travail en 2022 : l’exploitation toujours plus meurtrière

La CNAM (Caisse nationale d’assurance maladie) a publié son rapport annuel sur les risques professionnel. Selon les données analysée par Politis, 903 personnes sont mortes au travail en 2022. Un record macabre qui reflète une exploitation toujours plus violente.

Léna Nilène

5 janvier

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903 personnes mortes au travail en 2022 : l'exploitation toujours plus meurtrière

Une première donnée nous frappe dès le début du rapport de la CNAM : « En 2022, on dénombre 738 décès parmi les accidents du travail reconnus, soit 93 de plus qu’en 2021 ». Selon le média indépendant Politis, cette hausse importante pourrait être expliquée par la crise sanitaire qui a touché le pays en 2020-2021, et qui a par conséquent provoqué un ralentissement d’une partie de l’activité économique. L’année de 2022 n’ayant pas subi de tel phénomène, les chiffres prélevés à partir de cette dernière sont ainsi les premiers, depuis la fin de l’épidémie, à dévoiler des données qui permettent une comparaison plus pertinente de l’évolution du nombre de morts au travail.
Et les résultats de l’enquête sont effarants. Un tel niveau de mortalité n’avait pas été comptabilisé par la CNAM depuis 20 ans. En effet, le nombre de morts de 2022 dépasse même celui de 2019, qui s’élevait déjà à 733, selon l’Assurance maladie.

Selon Politis, 2022 est de loin l’année la plus mortifère pour les travailleurs

En effet, si l’on additionne le nombre de travailleurs morts au travail, tous régimes de sécurité sociale confondus, on obtient un nombre s’élevant à au moins 903 personnes. Un chiffre qui ne prend pas en compte les travailleurs rattachés à la fonction publique, ainsi que ceux des régimes indépendants. Pour Mathieu Lépine, qui, via son compte X/Twitter, recense depuis 2019 les accidents du travail mortels en France, les morts au travail sont, de fait, largement sous-estimés et invisibilisés.

En nette augmentation dans tous les secteurs, la mort au travail a, selon les chiffres disponibles, le plus augmenté dans le secteur agricole. En effet, en 2019, le nombre de morts au travail de ce secteur s’élevait à 114 contre 152 en 2022 (soit une hausse de 33%).

Les travailleurs qui sont les plus victimes d’accidents du travail sont ceux qui sont en général les plus précaires et qui souffrent de condition de travail désastreuses. Les trois secteurs qui entrainement le plus de décès sont : le BTP, les transports, l’intérim, la santé, l’aide, et le nettoyage.

Les données publiées par la CNAM attirent également l’attention sur le décès des jeunes travailleurs et travailleuses, de moins de 25 ans. En effet, nombreux sont ces jeunes qui meurent dans des conditions atroces sur leurs lieux de travail par simple négligence de la part de leurs supérieurs, qui cherchent à maximiser leurs profits quitte à sacrifier des vies humaines. C’est le cas du jeune ouvrier de 22 ans, écrasé par une dalle en béton sur le chantier du Grand Paris en avril dernier. En 2022, 36 jeunes sont morts au travail, soit une augmentation de 29% par rapport à 2019.

La France championne d’Europe des morts au travail : merci Macron, merci les patrons

En conclusion : deux travailleurs.euses meurent chaque jour à leur poste en France, et 90 autres sont mutilé.e.s des suites d’un accident du travail, faisant ainsi de la France le pays d’Europe ou l’on décède le plus au travail.

Face à cette « hécatombe invisible », la seule chose qu’Olivier Dussopt, ministre du travail, ait trouvé à faire est de lancer en septembre dernier une campagne de prévention contre les accidents du travail. Le ministre avait alors annoncé vouloir provoquer un « électrochoc dans l’opinion publique » – comme si la responsabilité des morts au travail reposait avant tout sur la méconnaissance des dangers du travail par les salarié.e.s, et n’avait rien à voir avec les conditions de travail imposée par le patronat, ni avec les les différentes réformes touchant au droit du travail, qui n’ont fait que dégrader encore les conditions de travail des salarié.e.s. Concrètement, cette campagne se résume en une vidéo de 30 secondes ainsi que quelques affiches collées dans l’espace public visant à sensibiliser à la fois travailleurs et employeurs, comme si ces derniers étaient sur le même plan.

Une « hécatombe invisible » résultat de choix politiques, face auxquels il faut organiser la lutte

Le massacre silencieux des travailleurs et travailleuses s’inscrit dans un contexte d’autant plus particulier que se multiplient les attaques antisociales de la part du gouvernement, qui visent à fournir au patronat une main d’œuvre toujours plus précaire et sous pression. Réforme des retraites, de l’assurance chômage, du lycée professionnel, mais aussi loi immigration, qui vise à faire des étrangers une véritable chair à patrons et va encore renforcer la violence du travail et la concurrence entre les travailleurs.euses. Loin d’être inéluctables, les morts au travail sont le résultat de politiques qui mettent en danger la vie même des travailleurs.

Alors que les attaques se multiplient, et que le gouvernement cherche à toujours plus diviser et à précariser le monde du travail, il est urgent que les organisations syndicales organisent la riposte contre toutes les contre-réformes du gouvernement, en appelant notamment à se mobiliser et à participer aux manifestations du 14 janvier contre la loi immigration. Une loi raciste et xénophobe, qui constitue un nouveau laboratoire pour toujours plus d’exploitation des travailleurs-euses, les exposant toujours plus aux risques au travail. Défendre les droits des travailleurs.euses, c’est défendre le droit de toutes et tous les travailleurs.euses !


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