C’était en juin 2014, le groupe allemand MGMH décidait de fermer l’aciérie électrique ESB d’Ougrée pour manque de rentabilité et comptait dans la foulée massacrer l’emploi pour les 92 travailleurs encore occupés. En décembre, c’est un coup de théâtre. Une mystérieuse holding luxembourgeoise baptisée à l’époque REM a annoncé qu’il croyait en l’avenir de l’aciérie et qu’il allait, dans la foulée investir 117 millions dans l’aventure. Pour les travailleurs, ce repreneur pouvait signifié l’espoir de voir l’usine redémarrer, mais aussi de maintenir les emplois.
Trop beau pour être vrai ? Alors même que le repreneur s’était fait connaître tout juste après que le plan social ne soit annoncé et signé en juin 2014, on apprit très vite que sur les 117 millions, 100 étaient conditionnés à l’obtention d’un prêt de la Sogepa, organisme de financement de la Région wallonne. Mais aussi que le projet devenait de plus en plus gros, avec la reprise de la cokerie d’Ougrée et de l’usine Ringmills d’Arcelor. Dans le même temps, REM changeait de nom pour s’appeler « Green Elephant ». Pendant 18 mois, Green Elephant a reporté à deux reprises le redémarrage de l’aciérie sans donner de raison, tandis qu’elle n’a jamais fait parvenir à la Sogepa, des réponses à diverses questions afin d’obtenir une ligne de crédit.
Autant de signaux, qui ont fait prendre conscience aux salariés que pendant près de 18 mois l’opération n’était qu’une faillite « organisée avec l’ancien propriétaire » pour éviter un plan social toujours trop « onéreux » pour les actionnaires. « Les patrons nous ont menti depuis le début. J’ai voulu y croire jusqu’au bout, mais quand ils ont dit qu’ils n’allaient pas nous payer, j’ai compris et ça m’a mis hors de moi » raconte Nasksi, le soudeur qui a tenté de se suicider.
Non, alors que les médias dominants belges passent en boucle les images du tractopelle brûlé, ou du bâtiment administratif représentatif de la direction en partie détruit, et ne montre pas l’outil productif resté intact, ou encore des voitures des actionnaires embouties, ces derniers ne parlent aucunement de la dictature et du chantage patronal sur les salariés. Ils ne parlent pas non plus de l’exploitation quotidienne, de la pression à la rentabilité, de la précarité et de la peur quotidienne depuis 18 mois de ne pas pouvoir manger le soir, ne pas pouvoir payer le loyer, ou régler sa dette auprès des banquiers.
Non ce sont bien, actionnaires et directeurs, les agresseurs. Les salariés et leur colère ne répondent qu’à cette violence patronale, et à cette dictature qui voit les actionnaires fermer le robinet des salaires, prétextant ne plus avoir les moyens… Cette colère des salariés est légitime. La violence est du côté du patronat !