Le rassemblement devant le TGI a commencé le mardi midi par un barbecue convivial qui a réuni plus de 120 personnes : militants, jeunes, privés d’emplois, retraités, syndiqués… et ce malgré la période de vacances. Beaucoup ont choisi de montrer leur soutien aux deux jeunes rouennais injustement gardés à vue pendant la manifestation contre la loi Travail du 9 juin 2016.

Plusieurs acteurs et syndiqués ont souhaité prendre la parole avant de rentrer dans le TGI pour recontextualiser les accusations qui pesaient sur les deux manifestants. Ils sont revenus sur l’état d’urgence qui a pesé sur le mouvement et a permis au gouvernement, sous couvert de terrorisme, de donner libre court à la répression. Certains comme Reynald Kubecki, co-secrétaire de l’UL CGT, ont choisi de faire le parallèle avec les familles de victimes de violences policières : « Nous devons afficher une solidarité sans faille face à la répression, qu’elle vise des jeunes, des privés d’emplois ou des habitants des quartiers défavorisés… Nous devons créer des solidarités pour mieux se défendre face à la police et à la justice. Pour Théo, la famille Traoré, Amine Bentounsi, Rémi Fraisse mais aussi Abdoulaye Camara, Liu Shaoyao et pour beaucoup d’autres… »

Après les discours, nombreux sont ceux qui ont voulu remplir les bancs du tribunal pour apporter leur soutien mais seule une poignée a pu assister au spectacle de la justice de classe.

Durant le procès, le procureur qui a longtemps incriminé les deux étudiants a cru bon de ne pas parler trop fort à la présidente et aux juges comme pour rester dans l’entre- soi de la justice bourgeoise et empêcher les militants assis sur les bancs du fond de participer à l’inquisition ubuesque qu’ils étaient en train de faire. Le procureur qui avait comme seuls éléments de preuve contre les deux militants rouennais ; des bombes de peinture, du tissu, des ciseaux, des couteaux et du scotch, a tenté d’argumenter ;« ils avaient un projet de possibilité d’infraction », défendant la police qui ce jour-là « avait dans le souci de faire en sorte que les choses se passent bien », et puisque le ridicule ne tue pas il a finalement osé le tout pour le tout en allant jusqu’à assimiler les militants à des terroristes et en comparant la jeune fille qui avait refusé de donner ses empreintes à Mohammed Merah.

Face au procureur, Nicolas Capron, l’avocat des deux militants, a démonté les arguments un à un et a revendiqué le droit fondamental de pouvoir manifester qui avait été empêché à ses clients ce jour là. Il a tourné en ridicule ces policiers qui fondent leurs soupçons de commettre un délit sur le simple port d’un sac à dos, ou qui mettent en garde à vue des jeunes toute une journée pour la simple confection d’une banderole. Il a finalement démontré qu’il s’agissait d’un dossier vide, monté de toutes pièces, et que la manœuvre avait permis ce 9 juin 2016 aux policiers d’écarter des militants du mouvement. Il a par ailleurs dénoncé la nature politique du procès contre des manifestants. Le procureur qui réclamait sursis, stage de citoyenneté et amende, s’est trouvé bien déçu lorsque la relaxe a finalement été annoncée.

Les deux jeunes rouennais ont quitté le tribunal soulagés et ont retrouvé leur soutiens pour annoncer la nouvelle qui, dans cette période politique, apparaît comme une victoire pour notre camp.

Ce procès, à l’image de nombreux procès à la suite du mouvement contre la loi Travail, est un procès politique, qui vise à s’en prendre à tous ceux qui ont osé, il y a un an, défier le gouvernement et contester le choix d’une politique de casse des conditions de travail. Mais ce procès du 11 avril au Havre a ceci de particulier dans le sens où il a donné lieu à un front large et uni de travailleurs, syndiqués ou non, de retraités, de privés d’emplois, de jeunes, parfois aux sensibilités politiques différentes qui ont convergé pour affronter une fois de plus la répression.

Un bel exemple de convergence donc qui donne le ton des luttes à venir.