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Bordeaux. Un élève en situation de handicap exclu de son collège : le manque de moyens en cause

Début septembre, un élève en situation de handicap a été exclu de son collège suite à une crise de violence au cours de laquelle une infirmière scolaire a été blessée. Cet événement malheureux apparaît comme la conséquence du manque de moyens dans le secteur médico-social et de l'éducation nationale.

Olive Taïeb

27 octobre 2023

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Bordeaux. Un élève en situation de handicap exclu de son collège : le manque de moyens en cause

Crédits photo : Flickr / Salu972

Renvoi d’un élève en situation de handicap : l’Etat fautif

Début septembre, dans un collège à proximité de Bordeaux, Axel* (le prénom a été modifié), un jeune en situation de handicap, est entré en crise lors de la récréation, blessant une infirmière scolaire. Cet événement a choqué l’établissement scolaire, poussant plusieurs enseignants à exercer leur droit de retrait dans les jours suivants. Selon une partie de la presse, le jeune de seulement 13 ans a été qualifié « d’agresseur » et ses gestes ont été jugés « inacceptables » et « inexcusables ».

Pourtant, comme l’a justement expliqué la secrétaire académique du SNICS-FSU, cette situation est la conséquence « du manque de moyen et d’une inclusion dont on ne mesure pas toujours les enjeux et la réalité ». En effet, en y regardant de plus près, le cas d’Axel est l’illustration même de ce problème structurel. N’ayant pas pu faire sa rentrée dans un ITEP (Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique) faute de place, Axel a fait sa rentrée dans un collège en classe de 5ème dans un collège ordinaire. À cette première problématique s’est ajoutée l’absence d’accompagnement d’un AESH pendant plusieurs jours : d’après Le Figaro, l’AESH d’Axel aurait démissionné le 12 septembre, mais les entretiens d’embauche ne devaient débuter que le 22 septembre, laissant des enfants en situation de handicap sans l’accompagnement dont ils avaient besoin pendant cette période.

Ces difficultés combinées auxquelles Axel* a été confronté dans sa situation scolaire l’ont conduit à faire une crise, au cours de laquelle l’infirmière du collège a été blessée. De plus, selon Le Figaro, cette situation avait fait l’objet de plusieurs signalements de la part de l’infirmière, qui a fini par être blessée… faute de réponse. Enfin, par manque de formation, l’équipe n’a pas eu les moyens de contenir Axel et de le mettre en sécurité, pour lui et pour les autres.

Comme si cette violence institutionnelle ne suffisait pas, Axel a été directement renvoyé chez ses parents et a récemment été définitivement exclu de l’établissement. Il n’aura donc aucune solution d’accompagnement scolaire pendant plusieurs mois. Laisser un enfant dans cette situation est d’une violence inimaginable, aussi bien pour lui que pour sa famille. En effet, les élèves dans ces situations ont des besoins très spécifiques en termes d’accompagnement. Ces périodes de déscolarisation les font régresser et peuvent même aggraver leurs troubles, ce qui peut être fatal pour le reste de leur parcours.

Un cas loin d’être isolé

Le cas d’Axel est loin d’être unique. En effet, d’après une étude de l’UDAPEI (premier réseau français d’associations de représentation et de défense des intérêts des personnes en situation de handicap), tandis que 430 000 enfants sont en situation de handicap en France en septembre 2023, parmi les 2103 enfants suivis par le réseau, 23% n’ont aucune heure de scolarisation par semaine et 28% en ont entre zéro et six heures.

De plus, l’admission dans des établissements adaptés relève d’un véritable parcours du combattant. Pour obtenir une place dans un institut médico-éducatif (IME) ou un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (ITEP), qui sont les principaux établissements alternatifs de scolarisation et d’accompagnement des personnes en situation de handicap, il faut compter 4 à 5 ans.

Ces enfants se retrouvent donc à l’école, au collège ou au lycée. Sur le papier ils sont accompagnés par des AESH (Accompagnants d’Enfants en Situation de Handicap), mais une fois encore, la réalité du nombre de postes vacants, du manque de personnel et de moyens crée une situation bien différente. Celle-ci est telle que, selon le rapport de l’Unapei, un enfant en situation de handicap sur quatre n’aura pas pu faire sa rentrée cette année. En effet, il n’y a toujours que 125 000 AESH pour accompagner les 430 000 enfants en situation de handicap qui font leur rentrée dans l’enseignement cette année.

Une réalité bien loin des promesses de Gabriel Attal de recruter des AESH pour que « zéro enfant ne soit privé de rentrée », dont les AESH ont dénoncé l’hypocrisie. Elles avaient exprimé leur colère lors d’une journée de grève début d’octobre, suite à l’annonce de la réforme visant à fusionner le métier d’AESH avec celui des assistantes d’éducation. Elles exigent la reconnaissance de leur métier avec un véritable statut de la fonction publique ainsi qu’une augmentation significative des rémunérations. De quoi faire voler en éclat les déclarations d’intention du gouvernement de faire de « de l’inclusion des personnes en situations de handicap une des priorités du quinquennat ».

Augmentation des salaires et recrutement massifs

Le nombre d’accompagnements possibles diminue alors que le besoin de prise en charge et d’accompagnement augmente. Les exemples de mauvaise orientation d’enfants en situation de handicap, en raison du manque de places dans des structures adaptées et du manque de personnel pour les accompagner, sont trop nombreux.

Pendant que 413 milliards d’euros seront dépensés d’ici à 2030 pour l’armée, les services publics continuent de s’enfoncer dans de profondes crises en raison de coupes budgétaires. L’État réduit le budget du social et du médico-social d’année en année, tandis que les travailleurs eux-mêmes, maltraités par les institutions, finissent par adopter un comportement maltraitant envers les personnes qu’ils accompagnent. De plus, les personnes mal orientées se retrouvent seules face à une réalité administrative qui ne correspond pas à la leur, sans les moyens psychiques pour y faire face.

Mettre fin à ces situations doit commencer par mettre un terme à la précarité structurelle des professionnels, qui sont sous-payés, en sous-effectif, et dépourvus de moyens. Il est impératif de débloquer des moyens d’urgence, que ce soit en termes de budgets pour permettre à tous les enfants en situation de handicap d’être correctement accompagnés, mais aussi plus largement, de revaloriser les métiers du social en effectuant des embauches massives, en offrant des formations qui reflètent la réalité du terrain, et en proposant des augmentations de salaires significatives.


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