Seule sur scène avec sa guitare, ses talents de comédienne et son humour décalé, un tampon suspendu à sa tignasse dorée, elle fait rire son public et l’embarque dans ses délires. Quand elle entonne ses « chansons d’amour », elle demande à la salle de montrer son plus bel anus, plutôt que de faire des cœurs avec les mains.

GiedRé est de ces artistes grâce à qui des milliers de filles jeunes et moins jeunes en arrivent à se dire qu’après tout, ce n’est pas parce qu’on n’a pas de couilles qu’on ne peut pas parler de sexualité, que les filles aussi ont droit à la masturbation, et que les règles, c’est pas la honte. Vulgaire diront certains, immature diront d’autres… Peu lui importe, car elle revendique le droit à parler sans détour des vraies choses de la vie, que cela plaise ou non.

Elle ne tombe pas pour autant dans la chanson faussement engagée à la mode, dont elle aime se moquer, ni dans le «  féminisme cool  » devenu tendance. Dans un ton aussi décalé que subversif, elle interroge le sens de la vie et touche avec un cynisme sans limite des sujets comme la mort, le suicide, le sida, la prostitution, la sexualité, les discriminations, la pauvreté, les violences faites aux femmes, le handicap, la fin de vie, la solitude, la religion, l’enfance, la pédophilie… la liste est longue. Ses paroles sont crues mais GiedRé se défend de tout pessimisme : « Je ne suis pas méchante, c’est le monde qui est pourri. Si la vie était moins violente, je le serais aussi », chante-t-elle. L’équilibre est si subtil entre ses textes incisifs et son joyeux personnage, que le public s’attache et en redemande. Et si GiedRé compte des millions de fans, ce n’est pas tant parce qu’elle parle de caca et de sodomie mais bien parce qu’elle touche aux plus grands maux de notre société. On comprend alors que ce n’est pas une fatalité, et ça redonne le moral.

GiedRé se moque ouvertement des présentateurs de télévision à la Jean-Pierre Pernaut et de leur injonction au bonheur, elle qui pense que les enfants mériteraient qu’on leur explique la vraie vie : «  Il faudrait dire aux petites filles que le prince charmant sera en retard, il est occupé en Roumanie à acheter des putes pour son bout de trottoir  ». Quand elle écrit au Père Noël, elle lui demande de lui apporter « un petit chinois », parce que c’est quand même bien plus pratique et écologique d’« avoir un chinois chez soi » pour fabriquer tous ses cadeaux. Ses textes s’en prennent à la société de consommation et à l’abrutissement médiatique, et plus subversif encore, à ceux dont le rôle est de maintenir l’ordre établi : «  Eh venez, on arrête de poser à poil pour du dentifrice... Eh venez, on arrête de dire qu’ils sont comme nous ceux qui bossent à la police  ».

Dans son nouvel album Lalala, GiedRé met à l’honneur une grand-mère réactionnaire dont les enfants n’attendent que la mort, un SDF dont personne n’a rien à faire parce que « les clodos c’est pas des hommes », Michel, l’éboueur que tout le monde ignore, Dieu « l’arnaque » qui donne « des vies toutes pourries », l’homme politique qui ferait mieux de « tirer la chasse » après avoir parlé, ou encore le « tout le monde » qui s’abrutit devant la télé pour oublier que « la vie ne sert à rien ». Sur scène, elle épingle les dernières trouvailles du gouvernement : du 49.3 à la déchéance de nationalité, en passant par l’état d’urgence et le tout sécuritaire. Pour elle, toutes ces inventions délirantes devraient partir avec la chasse. Avec GiedRé, rien ne sert de se mentir, elle nous met face à la vie dans ses dimensions les plus cruelles. Une façon d’en rire, peut-être, et de se questionner, sûrement.

Interview exclusive pour Révolution Permanente :


Mes chansons préférées :

« Pisser debout » (Mon premier disque, 2011)


« Et toc »  (Mon premier album vendu dans les vrais magasins, 2013)


« Toutes des putes » (Mon premier album avec d’autres instruments que juste la guitare, 2014)


« Comme tout le monde » (Lalala, 2016)