Yano Lesage

Incapables d’investir dans des équipements à même de réduire leurs coûts de production et de rester compétitifs, beaucoup d’exploitants se retrouvent en difficulté financière, peinent à vivre de leurs activités et disparaissent. Le revenu moyen d’un éleveur, autour de 12 000 euros par an, un revenu inférieur au SMIC annuel, cache d’énormes disparités, encore une fois, entre gros et petits.

La crise du modèle agricole français entraîne une accélération du mouvement disparition-concentration des exploitations et des fermes. Beaucoup d’exploitants ruinés, forcés de vendre, sont contraints à retrouver un travail salarié... dans ces mêmes usines agro-alimentaires qui ont causé leur perte. Pour les plus résistants, l’heure est au rachat et à l’investissement pour renforcer la compétitivité, et au développement d’un modèle agricole sur-productiviste, au sein de grandes exploitations, dont l’objectif reste la rentabilité et non la qualité, à l’image de l’adaptation de l’agriculture espagnole au modèle américain. C’est aussi l’heure, pour les géants de l’agro-industrie, de renforcer leurs poids dans la filière. Intermarché profite ainsi de la crise porcine pour développer sa filiale Agromousquetaires, filiale qui a récemment racheté l’ex-usine d’abbattage Gad, en investissant massivement.

Face à cette crise profonde qui touche l’économie agricole française, les réponses apportées par le gouvernement avec la réglementation du prix au kilo, totalement inefficace face à la dictature imposée par l’agro-industrie, s’avèrent totalement illusoire. La seule solution à la crise structurelle que traversent les campagnes françaises et le monde agricole passerait par une refonte complète des filières sous contrôle d’une agriculture paysanne, des travailleurs de l’agro-industrie et des consommateurs. Les petits éleveurs n’en ont pas moins raison de se battre pour un revenu décent. Mais leurs ennemis, ce ne sont pas les agriculteurs du reste de l’UE mais les banques qui les condamnent à l’endettement, une grande distribution qui les écrase et un gouvernement qui se situe du côté des deux premiers.