Des milliers de personnes s’étaient mobilisées le 20 janvier dernier lors du procès en première instance qui avait conduit à la relaxe de Saïdou et Saïd Bouamama. Les juges avaient alors estimé que la plainte de l’AGRIF pour « injures raciales » et « provocation à la haine raciale » contre les « Français blancs dits de souche » était injustifiée. La justice bourgeoise avait en effet refusé de reconnaitre la catégorie invoquée de « Français de souche », ajoutant que la « blancheur » n’était pas une composante juridique de la qualité de Français. Pourtant, il n’est pas dit que la justice soit toujours aussi ferme avec l’extrême droite, ce pour quoi la mobilisation en solidarité avec Saïdou et Saïd Bouamama est déterminante. On sait notamment à quel point la justice est clémente avec les crimes policiers perpétrés contre les jeunes de banlieue, et répressive envers ceux à qui l’on refuse des papiers ou qui n’ont pas la « bonne » couleur de peau. Aucune illusion à avoir, donc.

A l’origine de la plainte, un ouvrage et des paroles qui dénoncent sans mâcher leurs mots : « Nique la France et son passé colonialiste, ses odeurs, ses relents, ses réflexes paternalistes. Nique la France et son histoire impérialiste, ses murs, ses remparts et ses délires capitalistes ». Il est clair que ce ne sont pas « les français », comme catégorie supposée homogène, qui sont visés ici. Il s’agit d’une dénonciation sans ambigüité de l’Etat français, de la violence de sa colonisation et de ses guerres impérialistes, mais aussi du racisme qui perdure comme une dimension intrinsèque du système capitaliste. Comme l’a souligné Saïd Bouamama, le « racisme anti-blanc » est un non-sens car « le racisme est toujours le fait du dominant à l’encontre du dominé ». L’intolérance qui peut s’exprimer de façon anecdotique envers les blancs n’a rien de comparable avec le racisme, systémique, de l’Etat français et de ses institutions. Ce racisme qui condamne les classes populaires « issues de l’immigration » à une précarité et une exploitation encore plus grandes, en plus de l’oppression quotidienne que constituent les contrôles au faciès et les violences policières dans les quartiers.

A l’heure où des milliers de migrants meurent aux portes de l’Europe, alors que l’on apprenait récemment la mort d’un intérimaire sans-papiers chez Manpower dissimulée pendant des mois, à 10 ans de la mort de Zyed et Bouna dont les policiers responsables ont été relaxés, et à quelques jours du 54e anniversaire du crime d’Etat toujours impuni de centaines d’algériens à Paris… Saïdou et Saïd Bouamama ont mille fois raison de dénoncer la violence de l’Etat français, de ses institutions, de son histoire coloniale et de ses guerres impérialistes. Soyons nombreux à les soutenir ce mercredi à 13h, devant le TGI de Paris.