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Manifestations anti-racistes au Royaume-Uni

Une statue d’un marchand d’esclaves déboulonnée et jetée dans le port de Bristol

Alors que le Royaume-Uni a été le théâtre de manifestations massives contre le racisme deux semaines après la mort de George Floyd à Minneapolis, une statue d'un marchand d'esclave a été déboulonnée à Bristol, avant d'être jetée dans le port de la ville. Illustration d'un mouvement plein de radicalité également de l'autre côté de la Manche.

Jackson Leniwy

8 juin 2020

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C’est l’une des images des manifestations qui ont eu lieu tout au long du week-end au Royaume-Uni. Alors que des dizaines de milliers de personnes ont défilé dans tout le pays et principalement à Londres, une statue symbole du passé colonialiste du pays a été déboulonnée à Bristol. Erigé en 1895, le bronze représentait Edward Colston, ex-député britannique du XVIIe siècle, et marchand d’esclaves. Il a été jeté dans le port fluvial de cette ville du sud-ouest de l’Angleterre par les manifestants ce dimanche.

Depuis le 25 mai dernier et la mort de George Floyd, homme noir de 46 ans étouffé par la police de Minneapolis, les Etats-Unis sont en proie à des émeutes pour réclamer justice et l’égalité pour les populations afro-américaines. Des protestations qui se sont largement répandues en Europe, et le Royaume-Uni ne fait pas exception. Ce sont des dizaines de milliers de jeunes britanniques qui ont battu le pavé ce week-end, dénonçant le « racisme institutionnel » de la société britannique, illustré par le scandale Windrush, qui a vu pendant plus de dix ans le gouvernement contester la nationalité britannique de milliers de personnes originaires des Caraïbes. Une affaire qui avait abouti en 2018 à la démission d’Amber Rudd, alors secrétaire d’Etat à l’Intérieur, pour avoir menti devant une commission parlementaire sur l’existence d’objectifs d’expulsions fixés par le gouvernement britannique.

Des manifestations dénoncées par le Premier ministre conservateur Boris Johnson, qui a qualifié de « voyous » les participants. « Les manifestants ont le droit de protester, mais la violence est une trahison à la cause qu’ils prétendent défendre », a-t-il notamment affirmé.

Du côté de Bristol, le maire de la ville Marvin Rees a timidement condamné la présence d’un symbole du passé esclavagiste du pays dans sa ville, sans manquer de dénoncer les manifestants. « En tant qu’élu, je ne peux évidemment pas tolérer les dégradations et je suis très préoccupé par les implications d’un rassemblement de masse sur la possibilité d’une deuxième vague [de coronavirus] », a-t-il déclaré à la BBC. « Mais je suis d’origine jamaïcaine et je ne peux pas dire que j’ai un véritable sentiment de perte pour la statue ». Une statue qualifiée « d’affront personnel » par Reeves, qui a toutefois précisé que s’il n’envisageait pas la provocation de la remettre à sa place, cette dernière terminerait probablement dans un musée.

Même son de cloche pour le chef de l’opposition travailliste, Keir Starmer : « On ne peut pas avoir une statue de marchand d’esclaves en Grande-Bretagne au XXIe siècle. (…) C’est un homme responsable de l’envoi de cent mille personnes d’Afrique vers les Caraïbes pour devenir esclaves, dont des femmes et des enfants, avec le nom de sa compagnie sur la poitrine. »

Enfin, pour l’association de protection du patrimoine Historic England – qui n’a pas manqué de condamner un déboulonnage illégal –, « la statue était un symbole d’injustice. Nous ne pensons pas qu’elle doive être réinstallée ». A noter que cette statue n’est pas la seule à avoir été prise pour cible, puisqu’à Londres une représentation de Winston Churchill s’est vue ajouter l’inscription « était un raciste » sous le nom de l’ancien dirigeant de l’Empire britannique.

Ces nombreuses prises de position témoignent du rapport de force qu’a imposé la mobilisation historique depuis les Etats-Unis et à travers le monde, rendant impossible pour les politiques de continuer de refuser de reconnaître les violences policières ou le racisme. La présence même de statues de figures colonialistes et esclavagistes, célébrées sur un piédestal dans les places publiques est un révélateur du racisme structurel d’un système construit sur une base raciste et colonialiste.


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