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Impérialisme

« Plan Mattei » : Meloni présente son projet néo-colonial d’investissements en Afrique

Lundi dernier, Giorgia Meloni a dévoilé son fameux plan Mattei lors d’un sommet international « Italia-Africa ». Ce plan néo-colonial qui prévoit de nombreux investissements en Afrique dans le domaine énergétique permettrait à l’Italie de se placer au centre d’une politique européenne de spoliation des ressources africaines, ainsi que de renforcer sa politique anti-migrants.

Léo Stella

7 février

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« Plan Mattei » : Meloni présente son projet néo-colonial d'investissements en Afrique

Crédit Photo : Ufficio stampa del Senato

Lundi 29 janvier, le gouvernement de Giorgia Meloni a rencontré à Rome les dirigeants de plusieurs pays de l’Union africaine. Le thème de la conférence « Italia-Africa » était la présentation du fameux « Piano Mattei » pour l’Afrique qui prévoit de nombreux accords avec les états africains. Un accord, qui permettrait à l’Italie et plus largement l’Europe d’investir en Afrique, notamment dans les ressources énergétiques, tout en prévoyant de futurs accords migratoires sur le renforcement des frontières et le rapatriement des étrangers en transit dans ces pays. Derrière ces accords, c’est bien un plan néo-colonial que Meloni compte mettre en place en lien avec l’UE afin de renforcer l’Italie sur plan géopolitique sous fond de crise de l’Impérialisme français.

Plan Mattei : un plan néocolonial pour continuer de piller l’Afrique tout en renforçant la position italienne

Le sommet Italia-Africa, qui a eu lieu les 28 et 29 janvier, a été le premier coup médiatique et politique de Giorgia Meloni de ce début d’année 2024, et marque la prise en charge de la présidence du G7 par l’Italie. Sur les 54 pays africains invités, 21 ont envoyé des chefs d’État ou de gouvernement, dont les présidents Kais Saied pour la Tunisie et Macky Sall pour le Sénégal. Les seuls absents ont été le Nigeria, dont le président nigérian Bola Ahmed Tinubu est un des principaux soutiens de l’Élysée sur le continent africain, ainsi que le Mali, le Burkina Fasso et le Niger qui ont récemment quitté la CEDEAO. En plus des dirigeants africains, de nombreuses personnalités de l’UE comme les président.e.s de la Commission, Conseil et Parlement Européen, Ursula von der Leyen, Charles Michel et Roberta Metsola, ou encore de la BCE et du FMI étaient présentes lors du sommet.

Meloni a défini le plan Mattei comme une tentative d’écrire « une nouvelle page » dans les relations avec l’Afrique, avec une approche « non-prédatrice » et pleine de « compassion ». Selon Meloni, le plan Mattei serait aussi une manière de répondre au problème « structurel de l’immigration ». Pour financer ce projet, le gouvernement italien compte, en partie, s’appuyer sur des entreprises nationales et européennes, avec au premier plan le géant de l’hydrocarbure italien ENI.

Derrière ces belles phrases, c’est pourtant bel et bien une approche prédatrice et un plan néo-colonial que tente de mettre en place Meloni, en profitant du déclin de l’impérialisme français. Le plan repose sur des investissements étrangers, qui déforment les économies locales, en valorisant l’exportation des matières premières et des projets d’infrastructure générant de fortes dettes. Tout cela a pour effet d’accroître la dépendance économique du continent et de favoriser ces mêmes processus d’appauvrissement, de dépossession, mais aussi de destruction de l’environnement.

Avec le plan Mattei, Meloni compte renforcer la position politique et économique italienne en Afrique avec des investissements liés à des géants comme ENI et Impregilo (aujourd’hui WeBuild), qui ont déjà de nombreux projets liés aux ressources naturelles dans divers pays africains. Le plan Mattei va donc coordonner divers projets liés à l’énergie en Afrique, comme le projet « Corridor H2 Sud ». Ce projet, en coopération avec l’Allemagne, prévoit la construction de milliers de kilomètres de pipelines pour acheminer l’hydrogène de l’Afrique du Nord vers l’Europe via l’Italie. Grâce à ces projets, l’Italie veut profiter de la réduction des approvisionnements en hydrocarbures en provenance de Russie pour se renforcer en tant que centre stratégique dans l’exploitation des ressources énergétiques de l’Afrique et devenir le « hub énergétique » de l’Europe. Kenya, Mozambique, Algérie, Tunisie…. Meloni et ENI ont déjà largement commencé leurs plans de spoliation de l’Afrique. Des projets qui ne peuvent se concevoir qu’avec l’accord des élites africaines, comme Macky Sall, qui maintiennent leurs pays dans la misère avec le soutien des puissances impérialistes.

Le soutien de l’UE dans la traque anti-migrant de Meloni

L’autre axe du sommet mis en place par Meloni est la continuation de son plan anti-migrants en lien avec l’UE. Sur le modèle tunisien mis en place en juillet, Meloni compte continuer sa politique d’externalisation des frontières en échange de « l’aide financière » apporté aux pays africains, comme elle l’avait annoncé lors de ses vœux pour 2024. En ce sens, l’un des objectifs de ce sommet était de signer, dans un second temps, de nouveaux accords pour encourager les rapatriements et bloquer les départs de migrants.

Cette politique du renforcement de l’Europe forteresse, et le rôle de Meloni dans cette politique, s’est vu à de multiples reprises l’année passée. Que ce soit dans l’élaboration du Pacte Asile et Immigration de l’UE ou dans les félicitations de nombreux gouvernements européens quant à sa politique migratoire, légitimant ainsi sa politique d’extrême droite sur les questions migratoires à l’échelle européenne. Une politique anti-migrants qui au-delà de la cheffe d’extrême droite s’est incarnée dans différents gouvernements européen allant du centre-gauche à la droite conservatrice. Macron, Olaf Scholtz, Rishi Sunak, Mitsotakis… Tous ont mis en place des décrets ou des lois réactionnaire visant les migrants.

Le fait que Ursula Von der Leyen ait assisté Meloni dans nombre de ses déplacements en Tunisie, durant l’épisode de Lampedusa et dernièrement lors du sommet « Italia-Africa » montre également que l’UE a un rôle central de ce renforcement sécuritaire et xénophobe. Lors de ce sommet, Von der Leyen a mis en avant le « Plan Mattei », le décrivant comme un plan qui s’inscrit parfaitement dans le cadre de l’European Global Gateway, un projet de développement des réseaux et des énergies renouvelables promu par la Commission européenne qui a aussi promis une série d’investissements pour la coopération avec l’Afrique d’une valeur totale de 150 milliards d’euros. Couplé à Von der Leyen et d’autres figures du Parlement Européen, des représentants de diverses institutions internationales, qui jouent un rôle important dans l’endettement et le vol des ressources en Afrique, ont également participé à la conférence : de l’OCDE à la Banque mondiale, des Nations unies au FMI. Tous ont apporté leurs soutiens au projet néo-colonial et anti-migrants mis en avant par Meloni.

Tandis que les élections européennes risquent d’être le théâtre d’une vague électorale d’extrême-droite, favorisée par les politiques anti-migratoires de gouvernements comme Olaf Scholz ou Macron, le plan de Meloni montre comment l’impérialisme européen compte sous couvert « d’entraide et de développement écologique » continuer de piller les ressources de l’Afrique aux dépens des populations, tout en faisant un chantage économique pour continuer de renforcer l’externalisation des frontières. Pour faire face à cette montée des idées réactionnaires et les politiques mortifères des gouvernements européens, il est urgent de combattre les gouvernements d’extrême-droite, mais également ceux qui, comme celui de Macron, leur déroulent le tapis rouge par leurs réformes xénophobes, antisociales et autoritaires.


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