Dix-huit mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende : telle est la peine requise par le procureur à l’encontre de Christophe et Alex, deux responsables syndicaux de la CGT Énergie 33, qui comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Bordeaux ce mardi 21 novembre. « C’est scandaleux », « c’est politique, ils veulent faire peur », « il ne faut pas laisser passer ça » : sur le parvis des droits de l’homme, devant le tribunal, la centaine de personnes restées toute la journée en soutien aux deux syndicalistes sont sous le choc de la demande du procureur.

Concrètement, Christophe et Alexandre sont poursuivis dans le cadre des actions de "mise en gratuité", une méthode de lutte traditionnelle du secteur de l’énergie, et sont accusés de dégradation de biens et de mise en danger de la vie d’autrui. L’action ciblée par la justice : une coupure de courant le 23 mars, juste après l’utilisation de l’article 49.3, qui a touché l’hôpital Saint-André au centre-ville de Bordeaux. Le générateur de secours était alors hors d’usage, privant l’établissement d’électricité pendant un laps de temps très court. Le délibéré sera rendu par le tribunal le 9 janvier prochain.

Ces accusations ne trompent personne, et surtout pas les 800 personnes, dont de nombreux énergéticiens grévistes de la Gironde, réunis au plus fort de la mobilisation en début d’après-midi, en réponse à l’appel de la CGT Énergie 33, la FNME-CGT et l’UD CGT 33 pour soutenir leur collègue. « Nous avons été les fers de lance du mouvement contre la réforme des retraites, nous sommes la cible toute trouvée pour le gouvernement », affirme Virginie de la CGT Énergie 33, debout sur la rampe du camion du syndicat. « Ces intimidations sont graves et ne sont pas isolées. Quatre cents syndicalistes des IEG sont poursuivis pour des faits de grève durant la réforme des retraites. Ces convocations sont hautement politiques, le pouvoir franchit un nouveau cap dans la répression syndicale. Ces intimidations viennent du plus haut sommet de l’État. »

Ce mardi midi, 80% de grévistes ont été déclarés au niveau du département selon un élu du personnel CGT d’Enedis en soutien aux deux syndicalistes réprimés. Avec ce rassemblement, les travailleurs ont envoyé un message important de solidarité et de détermination pour faire face à la répression syndicale orchestrée par le gouvernement après le mouvement contre la réforme des retraites. À ce titre, Sébastien Menesplier, secrétaire général de la FNME-CGT, s’exprime au micro de Révolution Permanente : « Beaucoup de travailleurs et d’énergéticiens de la région sont présents. C’est très important, d’abord pour Christophe et Alex, mais surtout pour répondre aux attaques que nous subissons. Il faut que nous soyons solidaires et unis pour défendre nos libertés syndicales indispensables pour les temps à venir. »

Une nécessité d’autant plus actuelle que le gouvernement n’en a pas fini avec sa fuite en avant répressive, entre répression féroce des jeunes des quartiers populaires après les émeutes de juin dernier, criminalisation de la cause palestinienne et menaces de futures dissolutions. Tandis que le gouvernement cherche, derrière la demande du procureur pour les énergéticiens bordelais, à marquer au fer rouge le mouvement ouvrier et à l’intimider, la solidarité et la détermination à ne pas baisser la tête face à la répression qui se sont exprimées ce mardi de la plus belle des manières doivent continuer de s’exprimer. Alors que trois énergéticiens bordelais sont convoqués ce jeudi par leur direction pour un premier rendez-vous en vue d’un conseil de discipline pour les mêmes faits de grève, les travailleurs doivent s’organiser sur leur lieu de travail pour contraindre leur directeur à retirer toutes les menaces de sanctions, ainsi que revendiquer la relaxe immédiate de toutes les charges à l’encontre des syndicalistes.