Le discours était attendu. Après l’opération de com’ la plus ratée de l’histoire de la V° République autour de son livre de confidences censé relancer son hypothétique candidature, Hollande a choisi 30 ans après de faire le parallèle entre sa situation et celle du premier Chef d’Etat Socialiste. A l’agonie, Hollande tente d’incarner le François Mitterrand facilement réélu le 8 mai 1988. Pourtant, alors que Mitterrand n’avait souffert d’aucune forme de contestation en 1988, Hollande est contesté, y compris dans son propre camp.

Mais l’analogie n’est pas nouvelle. Depuis les attentats de Novembre, l’ancien député de Corrèze n’a cessé en effet de rejouer le film de « la France unie », qui fut bien plus effective pour son devancier, Mitterrand. Avec la déchéance de nationalité, le chef de l’Etat s’était déjà voulu au-dessus des partis, « rassembleur » et « protecteur », comme François Mitterrand en 1988. « Patrie », « nation », « unité » étaient répétés en boucle par le chef de l’Etat depuis les attentats. Mais « l’unité nationale » n’a duré qu’un temps. La crise de régime n’étant plus seulement latente.

C’est avec le projet de la déchéance de nationalité que le fiasco du quinquennat de Hollande s’est accéléré. Le « peuple de gauche » a vu ce projet de changement de la constitution pour ce qu’il était, un emprunt au programme de la droite et du FN. Mais c’est la loi Travail qui a parachevé la défiance contre ce gouvernement dit de gauche. Le parallèle avec Mitterrand lui a semblé immédiat. « En 1983, courageusement, il décide la rigueur, pour la France, pour éviter le risque de la fermeture », expliquait Hollande. Ce qu’il ne dit pas, c’est que suite à ce tournant, Mitterrand est Largement battu en 1986.

Autre différence fondamentale. A la suite de ses confidences dans Un président ne devrait pas dire ça.., Hollande est vilipendé y compris dans son propre camp. Même ses plus fidèles lieutenants le lâchent... Quatrième personnage de l’Etat, Claude Bartolone, le président de l’Assemblée nationale, est sorti de la salle au moment où François Hollande y entrait pour tenir son discours. L’entourage de Bartolone a affirmé que sa volonté était bien « politique » et qu’il s’agissait bien d’un signe de protestation. La rupture semble donc consommée, avec celui qu’il a qualifié de personnage « sans envergure ».

Ainsi, quels que soient les postures, ou les discours, l’analogie avec Mitterrand, pourfendeur de « gauche » des acquis du mouvement ouvrier, s’arrête très vite. Aujourd’hui tout sauf le « tournant de la rigueur » semble séparer Hollande de son prédécesseur. A l’agonie dans les sondages, il est crédité d’à peine plus de 10% d’intentions de vote. En octobre 1987, la cote de confiance de Mitterrand était à 60%. Elle ne tombera pas à moins de 56% jusqu’à la présidentielle de 1988. Pour Hollande, ce même baromètre le crédite de seulement 13% de confiance, le pire score d’un chef de l’Etat en exercice.

Pendant les années 1987, si l’hypothèse Michel Rocard avait beaucoup circulé c’est parce que Mitterrand lui avait laissé l’espace. L’objectif était de le laisser s’épuiser en le mettant à Matignon. Une opération que Mitterrand avait largement réussie. Aujourd’hui, même les soutiens de François Hollande en viennent ouvertement à se demander s’il peut à nouveau se présenter. Si les scénarios Manuel Valls ou Ségolène Royal sont échafaudés, c’est avant tout parce qu’une partie de son camp juge Hollande disqualifié.

Lâché de toute part. Il entraîne dans sa chute tout le monde avec lui, Valls le premier. Il est des situations où la crise politique latente s’approfondit sans y voir d’issue. Ressusciter Mitterrand, ou l’implorer n’y changeront rien.