En plein milieu des vacances d’été, des manifestations ont eu lieu dans quelques-unes des principales villes du pays, comme São Paulo, Belo Horizonte et Rio de Janeiro, contre l’augmentation des tarifs de transport qui passeraient en 2016 de 3,40 reais à 3,80. L’équivalent d’un peu moins de 1 euro, ce qui représente un coût énorme pour les couches populaires dans un pays où le SMIC tourne autour de 800 reais.

São Paulo : Répression et manipulation médiatique

À São Paulo, cette première manifestation, à l’appel de collectifs pour les transports gratuits, d’organisations étudiantes, du syndicat des travailleurs du métro et de partis de la gauche radicale, a réuni environ 7 000 personnes, soit plus que la première manifestation de juin 2013, avant la massification du mouvement. Une forte répression a été déclenchée, avec des tirs de balles de caoutchouc et du gaz lacrymogène, ainsi qu’une opération médiatique désignant les « casseurs » ou « black-blocks » comme coupables de l’affrontement avec la police. Si le gouvernement réprime de cette façon disproportionnée, c’est bien car il craint que le mouvement, à l’image de ce qui s’est passé en 2013, puisse s’amplifier très vite et voudrait tuer dans l’œuf cette perspective.

Une nouvelle génération militante

Il a de bonnes raisons d’avoir des craintes, car la mémoire de 2013 reste vivante. Dans une ville comme São Paulo, ce début de mobilisation a lieu très peu de temps après la mobilisation historique des lycéens de São Paulo, qui ont occupé pendant plusieurs semaines plus d’une centaine d’établissements scolaires et ont réussi à faire suspendre une réforme menée par le gouvernement de la région qui, sous prétexte de « réorganisation », allait fermer un grand nombre de lieux d’étude en aggravant les – déjà – très mauvaises conditions vécues par l’éducation publique au Brésil.

C’est donc toute une nouvelle génération militante qui a émergé dans ce processus dont elle sort en plus victorieuse, un processus devenu une sorte d’exemple national. Des nombreux artistes et intellectuels ont tenu à visiter les établissements scolaires occupés, à aider, à animer les occupations avec des débats et des concerts. Un groupe de musiciens, dont le très célèbre Chico Buarque a même enregistré une chanson en hommage au mouvement lycéen.

Troisième acteur

Mais l’émergence d’un mouvement massif de la jeunesse pourrait surtout mettre encore plus en difficulté le gouvernement Dilma Roussef, qui traverse d’ores et déjà une crise politique profonde, dans le contexte d’une dégradation brusque de la situation économique brésilienne et de scandales de corruption à répétition.

Une partie de l’opposition de droite a même ouvert une procédure pour obtenir l’impeachment de la présidente. Face à cette offensive, le Parti des Travailleurs (PT) de Dilma Roussef et ses relais dans les mouvements sociaux dénoncent une menace de « coup d’état » dans une tentative de rallier des secteurs de la population sous prétexte de lutter contre la droite « putschiste » et de « défendre la démocratie ».

La massification du mouvement qui vient d’être lancé pourrait donc surtout bousculer la polarisation existante entre le gouvernement qui applique une politique d’austérité et l’opposition de droite, avec l’entrée en scène d’un troisième acteur politique, celui de la jeunesse et des travailleurs mobilisés.