Boris Lefebvre

« Les apparences d’un conflit d’intérêts  ». C’est ainsi que Sylvain Fort, directeur de la communication d’En marche !, qualifie l’affaire dans laquelle le mouvement de l’ex-ministre de Hollande se retrouve. Pourtant, il n’aura fallu que deux jours à Jean-Jacques Mourad, médecin interniste à l’hôpital Avicenne de Bobigny, spécialiste de l’hypertension artérielle et membre de l’équipe santé de Macron, pour démissionner suite aux révélations de la Formindep. Cette association qui veille à l’indépendance de l’information médicale a mis le doigt sur les rapports étroits et très rentables qui unissent le médecin, le laboratoire Servier et le programme de campagne d’Emmanuel Macron.

Jean-Jacques Mourad a, en effet, démissionné de ses fonctions pour éviter que ses liens privilégiés avec le laboratoire Servier ne puissent entacher l’aura de probité que Macron a réussi à maintenir jusqu’à présent. Peu importe désormais. Le soupçon est de mise et le conflit d’intérêt est quasiment avéré. Tout d’abord, les liens qu’entretiennent l’ex-conseillé de Macron et Servier sont tout sauf anecdotiques. Entre 2013 et 2016, Jean-Jacques Mourad a cumulé plus de 66 interventions rémunérées par le groupe pharmaceutique en France et à l’étranger, assaisonné de 80 000 euros de frais restaurant et de transport. Devant de telles sommes, Irène Franchon, qui a démontré la responsabilité du groupe dans la diffusion du Médiator, déclare : « C’est du jamais-vu ! Je suis sidérée par le niveau d’avantages, de cadeaux et de conventions menées quasi exclusivement avec Servier ».

Un tel niveau de complicité entre le médecin spécialiste de l’hypertension artérielle et Servier est forcément suspect d’autant plus que le programme de Macron propose un meilleur remboursement des médicaments liés à cette pathologie, et qui constitue un marché de choix pour le laboratoire pharmaceutique. Une simple mesure qui irrigue beaucoup plus profondément la démarche du candidat libéral. Comme le souligne Anne Chailleu, présidente du Formindep, à propos des orientation d’En Marche ! sur la santé : « On retrouve tous les éléments de langage du lobby de l’industrie pharmaceutique […] M. Macron reprend à son compte notamment les justifications apportées par l’industrie pour ses prix devenus très élevés, et son plaidoyer pour un allégement de la procédure d’autorisation de mise sur le marché ».

Le scandale ne s’arrête pourtant pas là. Malgré la démission de Jean-Jacques Mourad de son poste auprès d’Emmanuel Macron, on peut compter sur Bernard Mourad, frère du médecin, ancien banquier personnel du milliardaire Patrick Drahi et conseillé proche du candidat pour continuer à démontrer que le conflit d’intérêt est la norme de ce système corrompu.