Ce mercredi 3 janvier, après plus de 5 mois de grève des compagnons d’Emmaüs de Saint-André-lez-Lille, le préfet de la région Hauts-de-France, Georges-François Leclerc, a demandé la fermeture de la Halte Saint-Jean pour des raisons de « sécurité ». Une tentative évidente de briser le mouvement de grève des travailleurs d’Emmaüs qui dure depuis juillet contre des conditions de travail honteuses.

Pour maintenir les travailleurs dans la surexploitation, la direction fait miroiter l’attribution du statut de « compagnon », permettant de toucher une indemnité et d’ouvrir la voie vers une régularisation, c’est un rythme de travail inhumain de 40 heures de travail par semaine pour un salaires de 150 euros et tout cela sans être déclaré, qui est imposée aux travailleurs. Deux plaintes ont donc été déposées, pour « traite d’êtres humains » et « travail dissimulé ».

Le préfet a demandé la fermeture du site sous prétexte que la sécurité vis-à-vis des risques d’incendies n’est pas assurée dans le bâtiment. Une décision que Georges-François Leclerc prétend être complètement indépendante du mouvement de grève secouant le site depuis plusieurs mois. Cependant, le rapport de causalité semble assez évident, Alixe Kombilas, représentante des compagnons grévistes, explique ainsi au micro de France bleu : « Moi, ça fait trois ans, je suis dans cette structure, il n’y a jamais eu une commission de sécurité qui soit venue pour voir si le bâtiment était dans les normes ».

La volonté de briser le mouvement apparait donc assez clairement. Après une forte répression du piquet de grève par la police, qui était venu gazer, tabasser et voler la caisse de grève, c’est désormais le préfet qui, main dans la main avec la direction de Emmaus, cherche à briser ce mouvement, profondément subversif dans la séquence puisqu’il vient remettre sur la table l’exploitation violente et xénophobe que subissent ces travailleurs sans-papiers. Ces derniers, en situation de grande précarité, vivent sur le site, sa fermeture est donc par ailleurs synonyme de l’expulsion de tous les « compagnons ».

L’arrêté de fermeture précise ainsi qu’il « Il incombe à l’exploitant, en application des dispositions de l’article L.184-1 du code de la construction et de l’habitation, d’assurer le relogement des personnes concernées le temps nécessaire des travaux et de la mise aux normes de l’établissement ». Traduction, le préfecture ne fera strictement rien pour garantir le relogement de ces travailleurs sans-papiers, quand bien même nous sommes en pleine période de trêve hivernale, et ce sera donc à la direction de la Halte Saint-Jean d’assurer le relogement des grévistes. Alors même que cette dernière, par la voie de Pierre Duponchel, directeur d’Emmaüs Saint-André, avait déjà expliqué le 19 décembre, avoir trouvé « des solutions pour les non-manifestants », mais pas pour « les manifestants ». Une discrimination assumée et honteuse qui entérine l’expulsion sans relogement d’une vingtaine de personnes sans-papiers, dans une situation de précarité extrême.

Plusieurs dizaines de soutien aux grévistes se sont réunis le 2 janvier devant le site de Saint-André pour dénoncer une direction qui, main dans la main avec la préfecture et la police, prévoit l’expulsion, en pleine trêve hivernale et sans aucun plan de relogement, de travailleurs en lutte. Une volonté de mater toutes formes de contestations, notamment des travailleurs précaires sans-papiers, dans un contexte de renforcement réactionnaire et xénophobe, dont la loi immigration est l’illustration la plus criante. Cependant, les grévistes ne comptent pas se laisser intimider et sont déterminés à continuer ce combat pour la dignité.