Alors que le réforme des retraites devrait entrer en vigueur en septembre prochain, certains travailleurs subissent d’ores et déjà les conséquences de la réforme. C’est le cas de seize salariés de la centrale nucléaire de Tricastin, du groupe Orano (ex-Areva), partis en retraites anticipés grâce à des accords d’entreprises depuis plusieurs mois et désormais forcés de reprendre le chemin de l’usine.

Nés après 1961, ces travailleurs avaient pu anticiper leur retraite grâce à des accords d’entreprise et en vertu de la pénibilité des tâches qu’ils effectuaient. Ils ont pourtant reçu début avril une lettre les informant qu’ils devaient retourner au travail, sans quoi ils seraient considérés en congé sans solde ou devraient subir une importante baisse de leur pension. Pour ces personnes, qui pensaient en avoir enfin fini avec le salariat, il s’agit d’une douche froide. Comme l’explique un des salariés concernés à France Bleu : « J’avais déjà le projet de partir m’installer dans le sud de la France, tranquillement, après une longue carrière dans l’entreprise. Finalement, je ne vends plus ma maison, c’est dégueulasse, j’ai cotisé et la règle c’était 42 ans, au bout de 41 ans et demi on change ».

C’est déjà ce que redoutaient plusieurs observateurs, alors que les conséquences de la réforme commençaient à être anticipées. Daniel Ferré, délégué CFE-CGC notait ainsi en février dernier : « Certains sont déjà partis ou en passe de le faire et pourraient se retrouver dans une situation délicate. Vont-ils être obligés de revenir pour quelques semaines, quelques mois ? Sans doute beaucoup n’en auront plus l’envie. D’autres, partis depuis plus longtemps, auront perdu des compétences. Et y aura-t-il seulement des postes à leur proposer ? » .

Une préoccupation d’autant plus d’actualité que le secteur concerné n’est pas n’importe lequel : Orano est le leader de l’énergie nucléaire en France et est plus spécifiquement chargé de l’extraction, l’enrichissement, le transport et le retraitement des combustibles nucléaires ainsi que de la gestion des déchets radioactifs. Les tâches concernées sont donc extrêmement sensibles. Pourtant, la réforme vient imposer à des personnes âgées de les effectuer, mettant en danger toute la population au nom de l’accroissement des profits et de la nécessité de combler un déficit imaginaire, sur le dos des plus précaires.

Une démonstration, s’il en fallait, du caractère injuste de cette réforme des retraites. Ainsi, alors que des travailleurs en subissent déjà les conséquences, l’heure n’est pas à la négociation avec le gouvernement. Le 1er mai s’annonce d’ores et déjà historique et 64% de la population se dit prête à continuer le combat. La stratégie de l’intersyndicale, avec ses douze journées de grèves isolées, a montré ses limites. Il s’agit maintenant de construire un véritable plan de bataille face au gouvernement pour le faire plier.