Crédits photo : Hubert2T/Pixabay

Ce témoignage a été recueilli dans le cadre de la campagne anti-répression menée par le collectif jeune de Révolution Permanente, Le Poing Levé. Pour y participer également et témoigner, vous pouvez remplir ce formulaire.

Le Poing Levé : Bonjour, merci de nous accorder ton témoignage. Peux-tu commencer par te présenter et nous dire si avant ton arrestation, tu avais déjà participé à des manifestations contre la réforme des retraites ?


Je m’appelle Clara*, j’ai 20 ans. Je suis étudiante. J’ai rejoint le mouvement sur les retraites dès les premières manifestations. Je participe à l’AG des luttes de Brest.

Le Poing Levé : Peux-tu nous raconter comment s’est passée ton arrestation ?

J’étais en train de me disperser. On retournait vers la fac de lettres. Je discutais avec un camarade sur le fait que les policiers avaient ramené des boucliers alors que nous étions pacifiques. J’ai dit : « Tu as vu, ils ont ramené des boucliers parce qu’ils ont peur de nos papiers », car nous avions distribué des tracts devant la CAF... Un policier m’a entendu alors qu’il était à quelques pas derrière moi et m’a dit d’un ton assez agressif : « On a peur de quoi ? ». Ce à quoi j’ai décidé de ne pas redire la phrase, ce qui ne l’a pas empêché de me tirer par le bras en me faisant comprendre que j’étais en état d’arrestation, en me disant : « Allez toi tu viens ! » Après cela des collègues se sont offusqués et ont tenté de faire comprendre leur mécontentement. Ils ont alors subi une violente répression : coups de matraque, gaz lacrymogène et gaz au poivre. Pendant ce temps là j’étais tenue à l’écart par un policier qui me faisait une clef de bras alors que j’étais totalement calme. J’ai ensuite été amenée vers la voiture et j’ai demandé des précisions sur la raison de mon arrestation. On m’a répondu que c’était pour « trouble à l’ordre public » et « refus de se disperser ». Ce à quoi j’ai dit que l’on était en train de se disperser... Il m’a répondu que le trouble était déjà fait, ce qui m’a étonnée.

Le Poing Levé : Comment s’est passée la garde-à-vue ? As-tu subi des violences ?

L’état de mes camarades m’a choquée en GAV : ils étaient en pleurs et semblaient avoir reçu des coups et des grandes quantités de gaz alors que nous étions pacifiques. J’entendais les policiers se féliciter d’avoir fait une opération rondement menée, sans accrochage, alors que c’était eux qui avaient déclenché les violences. Ils étaient fiers de la façon dont ça s’était déroulé, alors que s’ils nous avaient juste laissé rentrer à la fac il n’y aurait eu ni violence, ni interpellations.

J’ai passé 24h en GAV où j’ai choisi de garder le silence. L’infraction qui m’était reprochée a changé deux fois : dans un premier temps ils m’ont dit que j’avais été interpellée car j’aurais résisté à mon interpellation, ce qui était complètement faux, et ils le savaient bien. Puis ils m’ont dit que c’était pour refus de se disperser après sommation. Alors que pour rappel, c’est le policer qui est venu vers moi alors que nous nous dispersions.

Le Poing Levé : Sais-tu si des charges sont retenues contre toi ?

Je suis sortie avec une convocation pour « refus de se disperser après sommation ».

Le Poing Levé : Comment te sens-tu depuis cette arrestation ?

J’étais un peu fatiguée mais me suis rétablie rapidement.

Vas-tu continuer à te mobiliser ? Sur quoi ? Qu’est ce qui te met en colère ?

Je vais continuer à me mobiliser contre le gouvernement, le fascisme, le capitalisme, toutes les dérives actuelles du système. Je suis particulièrement énervée qu’une poignée de bourgeois puissent tenir face à une majorité populaire.

Comment interprètes-tu le fait qu’autant de jeunes soient interpellés, réprimés dans les manifs ?

Le gouvernement sait très bien que l’on a pas les mêmes protections que les syndicalistes qu’ils semblent éviter pendant les moments d’interpellations. Il paraît plus facile pour eux de justifier d’aller taper contre les « méchants » étudiants qui se battent pour leurs droits, alors qu’au fond on a tous la même légitimité pour être en colère. Le simple fait que ma GAV ait duré 24h pour des raisons aussi futiles montre que le gouvernement utilise la répression policière pour essayer de nous démoraliser. Il demande aux policiers d’augmenter la répression pour casser le mouvement.

Comment vois-tu la suite ?

Les mouvements vont continuer à s’accentuer si le gouvernement continue de nous ignorer. Ils récoltent ce qu’ils sèment. Ils vont continuer à avoir des problèmes : le peuple va continuer à ne pas se laisser faire. Mais les vrais responsables ce sont eux.

* Le prénom a été modifié à la demande de l’intéressée