Les actions récentes du nouveau président ont causé un véritable tollé, et cela même du côté des républicains, à tel point que selon de nombreux hommes politiques une procédure de destitution (« impeachment ») pourrait être envisageable. Bien qu’il ne s’agirait pas, le cas échéant, de la première fois dans l’histoire des États-Unis, ce serait un nouveau tremblement de terre aux conséquences difficiles à prévoir.

Un président et des institutions plus affaiblies que jamais

Trump a fait scandale il y a à peine une semaine, après avoir limogé le directeur du FBI qui aurait mal traité Clinton en dévoilant à la presse de nombreux détails quant à l’enquête sur ses mails, détails que le milliardaire ne s’était pourtant pas gêné d’exploiter pour attaquer la candidate démocrate pendant la course à la Maison-Blanche. Cela a causé de nombreux remous aux États-Unis considérant qu’il pourrait tout autant s’agir d’empêcher les enquêtes sur les possibles liens du magnat de la finance avec la Russie avant et après les élections. Notamment celle sur Michael Flynn, conseiller à la sécurité nationale, qui était la cible d’une enquête par le FBI et sur lequel le président aurait fait pression. Cette semaine, il y a eu les fuites auprès de la presse sur la révélation d’informations secrètes au chef de la diplomatie russe ou encore les menaces de révélation à l’encontre de l’ancien directeur du FBI. La cote de popularité de Trump est au plus bas et le mot « impeachment » est sur toutes les lèvres.
Le représentant démocrate du Texas Al Green s’est fait, ce lundi 15 mai, le porte-parole du Congrès Américain en demandant à ce que le président se soumette à un procès politique concernant le limogeage du directeur du FBI et les ingérences russes concernant les élections de 2016. Il explique que « personne ne devrait être au-dessus de la loi » et que le limogeage de la tête de file des agences de renseignements est extrêmement grave et contestable. Il a appelé les représentants de la chambre basse à appuyer sa demande.
Cette crise politique qui frappe le président des États-Unis a également remis au cœur du débat politique le rôle du FBI (Bureau of Investigation). De nombreux hommes politiques qui misent sur la chute de Trump, cherchent à préserver cette agence de renseignement, qui est un pilier fondamental du capitalisme Etats-Unien, et qui sera indispensable pour faire face à la période d’instabilité qu’ouvrirait la destitution du président.


La procédure pourrait-elle aboutir ?

Les comparaisons avec le « Watergate » sont inévitables, même si à l’époque le Président Richard Nixon également menacé de procès suites aux enquêtes concernant les écoutes téléphoniques supposées du Comité National Démocrate avait été forcé à démissionner de son poste de président des États-Unis.
Le premier « Impeachment » dans l’histoire des États-Unis s’attaqua au président Andrew Johnson (1829-1837) et le second contre Bill Clinton (1993-2001).
Même s’il ne s’agit pas de la première fois qu’un président renvoie un directeur du FBI, à l’image de Bill Clinton en 1993 concernant une enquête sur fonds de malversation et détournements de bien publics, ce licenciement en lui-même n’est pas suffisant pour constituer un motif de destitution (obstruction à une enquête légale). Pourtant, le cumul de ces affaires et notamment la révélation d’informations classées secrètes (bien qu’autorisées au Président) sont l’occasion pour les partisans de la procédure de destitution de l’accuser de violer le serment présidentiel où il s’engage à « préserver, protéger et défendre la Constitution des États-Unis » (accusation systématiquement utilisée lors des trois procédures d’impeachment précédentes).

L‘aspect légal n’est pas le seul qui doit être pris en compte, il est également nécessaire d’évaluer le rapport de force entre ses soutiens et ses opposants. Là aussi le président semble mal engagé. Depuis sa prise de pouvoir son assise gouvernementale est faible (il n’était pas le candidat des capitalistes) et en seulement 4 mois de présidence, marquées par les divisions et les rivalités à l’intérieur de l’appareil d’État, la crise politique n’a cessé de s’aggraver sans aucune nouvelle positive permettant de contrebalancer cette spirale infernale.
Au niveau du Congrès, même si de nombreux Républicains ont unis leurs voix pour demander des éclaircissements sur les relations avec la Russie, la majorité du parti garde en tête ses objectifs : projet de réforme fiscale et du système de santé. Surtout qu’il est actuellement difficile d’évaluer à quel point toutes ces affaires ont ébranlé la base électorale du président et qu’il serait donc potentiellement dangereux de s’aliéner cette base.

En ce qui concerne l’opinion publique, selon une étude récente, 48 % des États-uniens souhaiteraient qu’un processus de destitution soit entamé contre le président Donald Trump. Étant donné que la décision finale est entre les mains du Sénat, la destitution ne semble pas réalisable dans l’immédiat. La procédure d’impeachment doit être votée à la majorité simple à la Chambre des représentants. Un procès s’ouvre alors au Sénat. Pour que le président soit destitué, il faut obtenir la majorité des deux tiers au Sénat. Mais si le président venait à continuer ce que de nombreux Républicains appellent des « gaffes » à un rythme aussi soutenu ou s’il venait à mettre en place une politique économique de type protectionniste comme il le prônait lors de sa campagne, le siège éjectable sur lequel il se trouve pourrait bien être activé.

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