Indifférence, larmes de crocodile ou déclaration de guerre. Les postures de Macron, reflet du rapport de force

Depuis le début de la crise des gilets jaunes, Macron a déroulé plusieurs partitions face aux manifestants. Sa stratégie classique de l’indifférence censée conduire toute contestation dans le mur de l’essoufflement naturel, voire du pourrissement, a vite été dépassée par le mouvement des gilets jaunes et son extraordinaire explosivité. Forcé de changer son fusil d’épaule, Macron s’est donc exprimé, lors d’une allocution aux airs de recul symbolique dans laquelle le président a mêlé larmes de crocodile et fausses concessions. Dès le début du mois de janvier, persuadé que le mouvement des gilets jaunes ne pouvait survivre aux fêtes de fin d’année, le discours de l’exécutif a changé encore une fois d’orientation, affichant cette fois un visage de fermeté alors que dans le même temps, les mutilations et blessures graves s’accumulaient. Persuadé d’avoir pour lui le rapport de force, c’est désormais la stratégie adoptée par l’exécutif qui tente chaque jour de trouver le moyen de serrer encore davantage la vis par le moyen législatif de la criminalisation des manifestations. Cette nouvelle « petite phrase », véritable spécialité de Macron, sous ses airs anodins, annonce peut-être un renforcement supplémentaire des mesures hostiles au mouvement des gilets jaunes et à tout mouvement social quel qu’il soit. Ce dernier s’est en effet, dans la foulée, senti obligé de préciser qu’il ne comptait pas faire interdire les manifestations. Paroles cependant.

Le droit de manifester remis en cause, leur démocratie n’est pas la nôtre

Le discours de l’Etat s’efforce sans cesse d’assimiler la pratique de la manifestation à une tentative de déstabilisation de la « démocratie » qui n’est dans sa bouche que le nom de sa domination sans partage. C’est ce rapport de force entre d’un côté, la confiscation institutionnelle de toutes les décisions publiques, et de l’autre, l’aspiration à la démocratie directe qui émane de l’organisation de toutes celles et ceux qui se battent pour défendre leur droit et de meilleures conditions de vie. C’est lui qui constitue la toile de fond de ces déclarations. La manière dont Macron perçoit les gilets jaunes est révélatrice de la nature de sa présidence sans compromis, véritable bulldozer social anti populaire. « Ils me tueront peut-être d’une balle mais jamais d’autre chose » a-t-il notamment déclaré à l’issue de sa visite au Puy en Velay, haut lieu de la mobilisation au mois de décembre. A l’approche des européennes et dans un contexte où l’opposition se voit incapable d’émerger ou de capitaliser sur la détestation du pouvoir en place, Macron applique la méthode Coué, et tente d’afficher un aplomb sans faille. Mais la crise pour lui est très loin d’être refermée, et tout est encore possible pour notre camp social.