Endetté de plusieurs milliards d’euros, Jean-Charles Naouri, PDG du géant de la distribution Casino a annoncé la mise en vente du groupe au printemps dernier, qui comprend également les enseignes Monoprix, Franprix, Spar, Naturalia et Cdiscount. Un consortium d’acheteurs – composé du Tchèque Daniel Kretinsky et du français Marc Ladreit de Lacharrière, ainsi que du fonds britannique Attestor – devrait finaliser le rachat durant les premières semaines de 2024.

Ces négociations promettent des attaques sociales d’ampleur, et le sacrifice des 50 000 salariés du groupe sur l’autel des intérêts de ces patrons multimilliardaires. Entre licenciement et casse violente des conditions de travail, le démantèlement du groupe Casino annonce un véritable drame social.

Quelques jours avant Noël, le 18 décembre, les groupes Auchan et Intermarché ont déjà annoncé le rachat de 313 hypermarchés et supermarchés du groupe, soit la quasi-totalité des magasins grandes surfaces de l’enseigne mis en vente fin novembre par Casino. Une décision prise après que le consortium d’acheteur a exercé des pressions sur le groupe, dans l’optique de se débarrasser de la part la moins rentable de l’activité avant le rachat.

Pour les 18 000 salariés concernés par ce premier rachat, il faut s’attendre à des dégradations importantes des conditions de travail, voire à des licenciements. « Pour le moment, ils rajoutent du monde dans les effectifs car ils étaient très bas. Mais il y a toujours des licenciements à la marge. Ce n’est pas quantifiable. Pour les conditions de travail, c’est sûr qu’elles vont baisser. Au bout de 15 mois, les employés de casino vont notamment perdre les avantages des accords d’entreprise » explique Jean Pastor, porte-parole de l’intersyndicale et délégué CGT Casino, interrogé par Révolution Permanente.

Dès le 19 décembre, Casino a annoncé aux syndicats un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) dans les bureaux et la logistique. Pour le moment, environ 1 000 personnes sont déjà menacées de licenciement et les négociations doivent commencer début 2024. Le syndicaliste s’attend lui « à ce qu’il y ait bien entendu plus de licenciements » dans cette branche de l’activité du groupe.

Plus largement, c’est une attaque violente contre les conditions de vie des 50 000 salariés du groupe qui s’annonce : « L’ensemble des salariés vont perdre leurs conditions de travail et leurs avantages. Toute la distribution de proximité sera franchisée. Donc chaque patron individuellement va tout faire pour casser les acquis et aura les mains libres pour cela. Et s’il n’y a pas des licenciements collectifs, on doit s’attendre à des licenciements individuels et à des départs forcés » explique le syndicaliste.

Face à cette bisbille patronale et aux drames sociaux qu’elle annonce, les salariés ne baissent pas la tête. Des débrayages ont ainsi eu lieu ces dernières semaines dans de nombreux magasins de l’hexagone. Le 23 décembre l’intersyndicale nationale a appelé à une journée de grève dans toute la France durant laquelle une cinquantaine de magasins se sont mobilisés, ainsi que 85 % des entrepôts.

Une nouvelle réunion est prévue ce jeudi 4 janvier entre la direction et le consortium d’acheteur. « On attend la mise en place d’un calendrier social avec toutes les échéances, le plan de sauvegarde de l’emploi accéléré, la vente des magasins, les négociations futures. On attend un PSE d’entreprise par rapport au siège social, aux entrepôts, et aux magasins qui fermeront également » annonce le porte-parole de l’intersyndicale.

Pour le moment, les syndicats veulent négocier une charte pour appliquer des avantages minimums pour les salariés et sont en discussion pour appeler à de nouvelles journées de grève. Alors que le conflit est d’ores et déjà fortement médiatisé, au point que le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a rencontré les syndicats il y a deux semaines, seul le rapport de forces et la grève peuvent permettre aux salariés du groupe de défendre leurs conditions de travail.