Certains ont pris la route ou le train très tôt pour être là : plus de 500 syndicalistes sont venus à Montmorency, une petite ville bourgeoise de la banlieue parisienne, pour soutenir le secrétaire général de la fédération CGT Mines-Energie. Partis du Haver, de Fos-sur-Mer, de Lille, de Cherbourg, de la Creuse ou encore du Gers, ils étaient nombreux à répondre à cette attaque historique contre la CGT. Sophie Binet était aussi présente pour soutenir un de ses camarades de la direction confédérale, ainsi que des députés de la France Insoumise.

Le dirigeant de la CGT est notamment poursuivi pour des coupures de courant réalisées lors de la bataille contre la réforme des retraites. Les enquêteurs et le parquet de Privas cherchent à attaquer les énergéticiens pour « mise en danger d’autrui par personne morale par violation manifestement délibérée d’une obligation réglementaire de sécurité ou de prudence » du fait d’une coupure de courant organisée dans la ville d’Annonay (Ardèche), ville où le ministre du travail Olivier Dussopt a été maire entre 2008 et son entrée au gouvernement. Des coupures que le secrétaire fédéral a pleinement revendiqué après sa sortie de la gendarmerie : « j’ai assumé, au nom de la fédération, que la cible c’était le ministre du travail et sa réforme ».

Mais au-delà des circonstances précises de la procédure, c’est la fédération entière qui est attaquée. En effet, jusqu’ici, ce sont surtout des militants syndicaux de terrains qui étaient poursuivis, particulièrement à GRDF en région parisienne, où une vingtaine de procédures disciplinaires ont été mise en place, mais aussi en Gironde et à Marseille, où les syndicalistes de la CGT sont poursuivis en justice. La convocation du dirigeant fédéral est donc un pas en avant dans la répression, ce qu’a bien noté Me Borzakian, l’avocat de Sébastien Menesplier : « au-delà des agents, ce qu’ils veulent frapper c’est l’organisation elle-même : c’est la CGT entière qui est visée » a-t-il dénoncé à la sortie de l’interrogatoire.

Une fédération regroupant des syndicats qui n’ont cessé d’être à la pointe des grands mouvements de ces derniers mois : d’abord lors des grèves pour les augmentations de salaires, puis contre la réforme des retraites. Alors que l’État reproche aux énergéticiens des coupures de courant, souvent symboliques, les syndicalistes ont tenu à rappeler un autre chiffre : les « 157 000 coupures de courant en électricité pour les plus pauvres en France, 157 000 foyers qui ont puni des pauvres auquel on a enlevé un bien fondamental qui est l’énergie », dénonce par Cédric Liechti, de la CGT Energie Paris, avant de continuer : « Quel dirigeant a eu à répondre de ces coupures ? Quand Renaud à Marseille fait une opération robin des bois et remet l’énergie gratuite pour les quartiers populaire, il est convoqué. Quand des gamins ont perdu leur dignité à 13 ans parce qu’ils ont été coupés des semaines voir des mois, personne n’est convoqué dans les commissariats pour répondre de cette violence ! ».

Si, en région parisienne, des agents de nombreuses centrales nucléaires se sont déplacés, de Gravelines (Nord), Paluel (Seine-Maritime), Chooz (Ardennes), Flamanville (Manche), Nogent-sur-Seine (Aube), d’autres rassemblements ont été organisés. A Bordeaux, une centaine de personnes ont fait le déplacement devant la préfecture. Là-bas aussi, la répression sévit : cinq énergéticiens avaient été mis en garde à vue le 24 mai dernier. Deux d’entre eux sont convoqués au tribunal correctionnel le 21 novembre prochain.

A Toulouse aussi une centaine de personnes se sont réunies devant la préfecture, avec la volonté de créer des convergences avec les mouvements écologistes et antiracistes, victimes de la répression. Jonathan, syndicaliste à la centrale de Golfech (Tarn-et-Garonne), expliquait ainsi au micro de Révolution Permanente que « le 23, la CGT appelle à participer aux rassemblements partout en France contre les violences policières ». Des convergences qui se construisent, parfois lentement, mais qu’il faudra amplifier face à toutes les offensives répressives du gouvernement. Une initiative à prolonger donc en campagne nationale contre la répression, pour les 400 militants CGT visés par des poursuites judiciaires, et pour tous les autres !