Dans le jargon politique, l’arc de force est une des données utilisées pour déterminer le volume de force à même d’être mobilisée dans toute lutte face au gouvernement ou au patronat sur des questions sociales et économiques, antiracistes, ou sur le terrain des droits démocratiques. En théorie, plus il est large, à savoir plus il y a d’organisations progressistes qui s’engagent dans la lutte, plus il permet de mobiliser un volume de force à même de défaire nos ennemis, qu’il s’agisse du gouvernement et ses relais, du grand patronat, ou plus généralement, des classes dominantes au pouvoir.

Le problème, cependant, c’est lorsque cet arc de force devient si large qu’il inclut ceux-là même qui sont les « architectes » des inégalités sociales et font le creuset du racisme sous toutes ses formes. Dans le cadre de ce rassemblement contre l’antisémitisme, une lutte antiraciste, l’arc de force allait du PS jusqu’à Debout La République, à LREM et jusqu’à potentiellement le RN de Marine Le Pen, qui était la bienvenue.

Pour aller droit au but, comment imaginer lutter contre le racisme avec Wauquiez ou encore Ciotti qui « demande qu’on interdise les manifestations [des Gilets jaunes] samedi prochain » ? Comment encore imaginer manifester avec le premier ministre Edouard Philippe, chef d’un gouvernement qui a participé… à la réhabilitation de Pétain à celle de Mauras ? Comment lutter contre l’antisémitisme avec l’invité qui a décliné l’invitation le RN (ex-FN) qui a participé des années durant à la montée de l’antisémitisme avec les propos Jean-Marie Le Pen. Quelques-uns de ses propos sont présents dans un article de L’Obs intitulé « Oui, Jean-Marie Le Pen a bien tenu des propos antisémites »

Non, ce n’est pas à République qu’il s’agissait de lutter réellement contre l’antisémitisme. Il s’agit en réalité de son instrumentalisation à des fins d’unité nationale. Une manifestation où participe la moitié du gouvernement, celui qui a institutionnalisé l’état d’urgence, fait voter la loi anti-casseurs, qui réprime et mutile à vie au flashball et au LBD les manifestants, qui exerce ses violences policières contre le mouvement social et multiplie les violences racistes.

Loin de mobiliser contre l’antisémitisme, cette opération réchauffée d’unité nationale grotesque servira comme une opération de blanchiment des premiers responsables, des années durant, de la banalisation du racisme sous toutes ses formes, y compris de l’antisémitisme. Définitivement, pour lutter contre l’antisémitisme, ce n’était pas place de La République qu’il fallait se trouver.