Jean-Patrick Clech

Elsa est résidente à Jérusalem où elle travaille à l’Institut français du Proche-Orient. Mi-décembre, alors qu’elle est enceinte de six mois, elle décide de rentrer en France pour passer les fêtes de l’autre côté de la Méditerranée. Au moment du retour, le 5 janvier, alors qu’elle a débarqué à l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv, on lui annonce qu’elle est refoulée. Elle est pourtant bien titulaire d’un passeport français de service mais les autorités invoquent un « risque pour la sécurité du pays ». Les raisons profondes de cette décision d’Israël qui la fera séjourner deux jours en centre de rétention avant de l’expulser vers la France ? Le fait qu’elle soit mariée à Salah Hamouri.

En mars 2005, Salah a vingt ans et suit des études de sociologie à Bethléem. Le jeune franco-palestinien, qui cumule la nationalité française avec le statut de Palestinien de Jérusalem et dispose de ce fait d’une carte d’identité israélienne, est arrêté lors d’un contrôle à un check-point. Immédiatement incarcéré puis déféré, il est accusé d’appartenance au Front Populaire de Libération de la Palestine, une organisation interdite en Israël, et d’avoir projeté un attentat contre le Rabin Ovadia Yossef, ancien Grand Rabin d’Israël et leader du parti ultra-orthodoxe d’extrême droite Shass. Sur les conseils de son avocate et pour éviter une peine de 14 ans de prison, Salah plaide coupable et écope d’une peine de 7 ans…

Même s’il a purgé sa condamnation, depuis sa libération, les tracasseries, les vexations et le harcèlement se poursuivent. On interdit à Salah l’entrée en Cisjordanie, ce qui l’empêche de finaliser son diplôme de droit. Sa femme, Elsa, s’est vu refusé un visa pour réunification familiale, alors qu’ils sont mariés et attendent un enfant. Sachant que le risque était qu’il ne puisse revenir à Jérusalem, Salah n’a pas accompagné Elsa pendant les fêtes, en France, mais, aujourd’hui, ils sont séparés.

Elsa ne sait pas si elle pourra effectivement accoucher à Jérusalem, la politique d’Israël de « désarabisation » de la ville consistant également, par ailleurs, à éviter au possible les naissances dans la ville pour les Palestinien bénéficiant du statut spécifique. Après le 15 février, Elsa pourrait ne plus pouvoir prendre l’avion. Après le père et la mère, ce pourrait donc être au tour de l’enfant d’être frappé par l’arbitraire sioniste. Soutenue par une pétition ayant recueilli plus de 11000 signatures en quelques semaines, par de nombreuses personnalités du monde politique et intellectuelle et après un rassemblement, hier, aux Invalides, plus que jamais, il faut que Elsa puisse accoucher à Jérusalem.