Une punition collective

Dans le cas des attentats de Paris, l’Etat Islamique entendait se venger de la participation de la France à la Coalition internationale en Iraq et des frappes de la chasse française contre des positions de l’EI, depuis septembre, en Syrie. Pour ce qui est de l’attentat de Bourj el Barajneh, un faubourg très populaire du Sud de la capitale libanaise, Daech s’est justifié en avançant qu’il s’agissait d’une punition dirigée contre le Hezbollah, dont les milices combattent, aux côtés du dictateur syrien Bachar al Assad, la rébellion syrienne « modérée » et les milices islamistes, dont l’EI. Comme toute la banlieue méridionale de Beyrouth et plus encore après la guerre civile libanaise, Bourj el-Barajneh est un quartier très largement chiite. C’est l’un des fiefs politico-électoraux de la formation de Hassan Nasrallah. Punition collective, a décidé Daech. Un peu comme celle qui est infligée par l’aviation française ces derniers jours sur Raqqa, « fief de Daech », selon les médias occidentaux.
L’attentat a été perpétré, à Beyrouth, avec minutie. Un premier terroriste a actionné sa bombe au milieu du quartier. Après l’explosion, les gens sont revenus, en masse, sur les lieux du drame, pour prêter secours aux blessés. C’est à ce moment-là qu’un second kamikaze a déclenché sa ceinture d’explosifs. Parmi les victimes, autant de jeunes, ou presque, que lors des attentats de Paris. La compassion internationale, pourtant, est loin d’être comparable.

Un deuil à deux vitesses

Que ce soit au niveau médiatique comme à celui des réseaux sociaux, la hiérarchisation des morts, à 24 heures de distance, a été flagrante. Dans la fausse égalité de l’internaute sur l’espace soi-disant gratuit de l’amitié virtuelle, Facebook a ainsi mis à disposition de ses utilisateurs parisiens la mention « safety check », pour que chacun puisse rassurer ses proches. Après l’attentat du 12 novembre, les Libanais n’ont pas eu droit à de tels égards de la part de la compagnie de Mark Zuckerberg. Les utilisateurs de Facebook ne manquent pourtant pas, de l’autre côté de la Méditerranée.
Il en va de même, d’ailleurs, pour le drapeau tricolore dont le fondateur du plus « populaire » des réseaux sociaux s’est empressé de colorer son profil. À aucun moment la direction de Facebook n’a songé créer un filtre rouge et blanc frappé d’un cèdre, aux couleurs du Liban, pour les utilisateurs qui l’auraient voulu.
On est fier du drapeau, surtout quand il est impérialiste. C’est un peu la leçon de démocratie que nous livre Facebook. Quant aux victimes, elles ne sont dignes d’un hashtag qui viralise que lorsqu’elles habitent en Occident. A l’instar de l’impérialisme, du côté des médias et réseaux sociaux occidentaux, c’est la réaction sur toute la ligne.