C’est une première depuis 1952 pour l’entreprise Cars Lacroix dans le Val d’Oise (95). Depuis ce lundi 26 février, 90 % des conducteurs de bus sont en grève pour réclamer des augmentations de salaires. Alors que l’inflation persiste, ils réclament 5 % d’augmentation et 600 euros de prime. Selon les salariés mobilisés, le mouvement devrait s’arrêter ce mercredi, mais il pourrait repartir le mois prochain en étant plus préparé.

À l’origine de la colère, ce sont des salaires qui ne suivent pas l’inflation tandis que les conditions de travail se dégradent. « On est la suite aux NAO (négociations annuelles obligatoires) qui se sont mal passées. On a vu le bénéfice exorbitant de cette entreprise qui ne nous laisse que des miettes. Il y a un ras de bol complet » expliquent ainsi les délégués syndicaux CGT et CFTC. En effet, alors que l’inflation sur l’année 2023 a été de 4,9 % avec les prix alimentaires qui ont augmenté de 11,8 % en moyenne, la direction a proposé une hausse des salaires de seulement 3,9 % dans le cadre des NAO 2024, entérinant ainsi une perte de « salaire réel » pour les salariés du groupe.

Face à cette annonce, la colère a rapidement explosé dans le groupe WhatsApp des conducteurs de bus dont les salaires oscillent autour des 1600 euros nets. Trois des quatre organisations syndicales (CGT, FO, CFTC), poussées par la jeune section CGT créée il y a un seulement un an, ont alors déposé un préavis de grève. Ce lundi, jour de rentrée des classes, ce sont plus de 160 des 180 conducteurs en CDI (hors arrêts-maladies) qui se sont mis en grève.

Devant l’entrée du dépôt, de nombreux grévistes dénonçaient des conditions de travail qui ne cessent de s’empirer, comme le décrit Christopher : « On a jusqu’à 14 h d’amplitude, certains collègues travaillent de 7 h à 21 h sans pouvoir rentrer chez eux pendant leur pause à cause du prix de l’essence. Récemment, de plus en plus de chauffeurs craquent et sont en arrêt-maladie, parfois pendant un à deux ans ».

Effectivement, ces dernières années, le nombre d’arrêts-maladies a explosé dans l’entreprise, alors que dans les années 2010, il n’y en avait jamais plus de 20, actuellement, ce sont plus de 40 chauffeurs qui sont arrêtés tandis que certains mois ce chiffre frôle la soixantaine.

Après la récente vague de grèves dans les transports en Île de France fin 2023 pour des augmentations de salaires et de meilleurs conditions de travail, c’est une nouvelle grève locale qui vient d’éclater dans le 95. Plusieurs ex-grévistes de Keolis Montesson se sont ainsi déplacés pour venir soutenir leurs collègues et partager leur expérience : « On est venus soutenir nos collègues de Lacroix, ils vont connaître les mêmes choses que nous qui avons fait 6 semaines de grève reconductible. Il faut que tout le transport se lève pour suivre ce mouvement-là et l’inscrire dans la durée ! ». Un discours juste qui permettrai de dépasser l’isolement de ces grèves locales.

Si le mouvement s’arrête ce mercredi, celui-ci pourrait néanmoins redémarrer en mars selon les grévistes, en étant mieux organisé avec notamment la mise en place d’une caisse de grève en ligne. Alors que, dans les bureaux, la direction joue la sourde oreille, il faut faire jouer le rapport de force et s’organiser pour inscrire le mouvement sur la durée, seule méthode à même de faire plier le groupe Lacroix.