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Nouvelle mesure repressive : Dupond-Moretti veut durcir le système de réduction des peines

Nouvelle mesure repressive du gouvernement : Dupond-Moretti veut durcir le système de réduction des peines. Une mesure qui fait débat dans le monde judiciaire et qui pourrait venir renforcer la surpopulation carcérale.

Coline Isabel

5 mars 2021

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Crédits : AFP

Ce jeudi 4 mars, l’avant-projet de loi concernant la réforme de la justice et préparé par les soins du garde des sceaux, Éric Dupond-Moretti, a été rendu public par Le Monde.

Cette reforme s’attaque au dispositif CRP (crédit de réduction de la peine), créé en 2004, qui consiste à l’accord automatique d’une réduction d’emprisonnement au moment de la prononciation de la peine. Calculée en fonction de celle-ci, elle accorde 3 mois pour la première année de prison et deux mois pour les suivantes. Concernant une peine inférieure à un an, on réduit celle-ci de 7 jours par mois, dans la limite cumulable de deux mois maximums. Selon le ministre, cette suppression entraînera la mise en place d’un nouveau système “fondé sur les efforts que le détenu fournira pour sa réinsertion : le travail, la formation, les soins... Je n’oublie pas non plus la bonne conduite envers les surveillants”. Or, ce système existe déjà : il s’agit du dispositif avec la réduction supplémentaire de peine (RSP) qui accorde des réductions de peine de façon non-automatique et qui récompense certains détenus qui font preuve d’un comportement exemplaire et qui démontrent leur intérêt pour leur réinsertion. 

Malgré les pistes déjà évoquées, cette proposition bien spécifique est une surprise pour tous et toutes. Selon le garde des sceaux, il s’agit de dénoncer un dispositif qui est appliqué “dans le seul but de réguler la population pénale, sans le dire”. Ce qui peut être sûr, c’est que la surpopulation carcérale augmentera pour de bon si cette proposition est retenue par le Conseil des ministres. Cela est même confirmé par certains juges d’application des peines comme peut le souligner Yvan Guitz : “Dans les faits, seul un quart des détenus se voient retirer ces crédits de réduction. Si on les supprime d’office, les peines seront donc plus longues”. L’Observatoire international rappelle d’ailleurs que lorsque Éric Dupond-Moretti était encore avocat, celui-ci avait signé une lettre ouverte s’adressant à Macron pour l’interpeller et l’inciter à “ne pas renouer avec l’inflation carcérale”. 

Qualifiée de ”populiste” par l’Association pour la défense des droits des détenus et certains avocats, Éric Dupond-Moretti renchérit en qualifiant cette mesure de “populaire” car elle s’inscrirait dans un projet de loi pour redonner confiance aux citoyens dans l’institution judiciaire. Il est d’ailleurs prévu de nommer le projet de loi de cette manière. Le ministre se sert aussi de l’argumentation connue des politiciens qui se rattachent aux “Français” pour la justifier. Comme s’ils savaient tous des opinions de ces “Français”, le ministre déclare : "autant les Français peuvent comprendre que des remises soient accordées pour récompenser un effort de réinsertion, autant ils ne peuvent accepter que ces réductions soient automatiques, comme aujourd’hui. Pour ne rien vous cacher, moi non plus".

Originellement, cette mesure avait été mise en place dans le premier but de favoriser un bon comportement de la part du détenu et est conditionnée à celui-ci pendant sa période de détention. En effet, ce dispositif peut être retiré dans des cas contraires et n’est, par ailleurs, pas automatique concernant les personnes condamnées pour terrorisme et dans certains cas de violences conjugales. 

Cet avant-projet de loi, qui sera présenté en Conseil des ministres mi-avril, est en réalité une revendication historique des syndicats de droite policiers qui estiment la justice comme pas assez “punitive” ou trop “permissive”. Ce discours se base sur le raisonnement qui impliquerait le fait que la justice ne fasse pas assez peur aux “délinquants”. Cette annonce est donc un cadeau fait aux syndicats et aux forces de police droitières qui veulent instaurer un climat répressif et de peur. Climat encouragé par le gouvernement qui se positionne dans une dynamique tout aussi répressive et sécuritaire, à l’image des différentes lois liberticides adoptées cette année. 

Le système pénitentiaire constitue un outil de domination de classe qui reproduit et accentue les violences au même titre que l’armée ou la police et exerce le pouvoir de répression de l’État bourgeois. À ce titre, la fonction pénitentiaire constitue le prolongement du bras armé de l’État et de sa police. Impossible à réformer, l’intérêt porté aux prisons devrait se poser sur la question de comment vider les prisons et surtout de comment ne pas les remplir.


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