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Contre-offensive

Sanctions financières « dès la première connerie » : Macron menace les familles des quartiers populaires

En visite auprès de policiers, Macron a évoqué lundi la possibilité de « sanctionner financièrement les familles » des jeunes des quartiers populaires à la moindre condamnation. Une énorme attaque contre les quartiers populaires, pour tenter de leur faire payer la révolte des derniers jours.

Gabriella Manouchki

5 juillet 2023

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Sanctions financières « dès la première connerie » : Macron menace les familles des quartiers populaires

BFMTV

À l’occasion d’une « visite nocturne » dans une caserne ce lundi soir, Macron a annoncé son intention de « sanctionner financièrement et facilement les familles » des jeunes des quartiers populaires à la moindre condamnation.

Dans une mise en scène relatée par Le Parisien, face aux policiers qui réclament des mesures pour « taper au portefeuille » les familles des jeunes, « le président réfléchit à haute voix » : « une sorte de tarif minimum dès la première connerie ».

Une manière d’étendre encore les pouvoirs de la police et le harcèlement quotidien par des contrôles, des humiliations, des violences dans les quartiers populaires. A la faveur de l’énorme répression policière et judiciaire en cours, ce sont de nouvelles attaques durables contre les quartiers populaires qui se dessinent.

Une surenchère répressive sous pression de la droite et de l’extrême-droite

Lors de son allocution vendredi dernier, Macron faisait déjà de la criminalisation des familles un axe central de sa réponse aux révoltes qui ont secoué les quartiers populaires : « C’est la responsabilité des parents de garder les jeunes à leur domicile. (...) La République n’a pas vocation à se subsister à eux. », avait-il affirmé.

Dans le weekend, Dupond-Moretti a concrétisé la menace du président : « Nous exigeons qu’ils tiennent leurs enfants. Il existe une infraction que le code pénal punit de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende chaque fois que les parents, par leur désinvolture coupable, mettent en péril l’éducation, la moralité et la sécurité de leurs enfants », a-t-il martelé en référence à l’article 227-17.

Des déclarations que la droite et l’extrême-droite se sont empressées de saisir pour remettre sur la table une demande de longue date : « J’avais porté une loi qui supprimait les allocations familiales aux parents des enfants délinquants, abrogée sous François Hollande », a notamment suggéré Éric Ciotti ce dimanche.

L’occasion d’un « débat » réactionnaire, François Bayrou expliquant de son côté préférer l’option d’une « amende immédiate pour la famille » ce mardi sur LCI. Sur RTL, ce mercredi, Valérie Pécresse abondait dans ce sens en croyant nécessaire d’ajouter la menace d’expulsions des logements sociaux, et l’instauration des peines planchers d’un an de prison ferme pour les jeunes interpelés dans les révoltes.

Aidé d’un matraquage médiatique permanent sur les « pillages » et les « saccages », le gouvernement a déjà déployé une répression policière et un traitement judiciaire d’exception. Pour accompagner cette politique, il s’agit maintenant de faire porter aux familles des quartiers populaires la responsabilité de la situation. Une manœuvre profondément hypocrite, qui vise au nom de la « moralité » et de la « sécurité » des mineurs, à retourner l’opinion contre des jeunes dont on a assassiné celui qui pourrait être un frère, et à élargir les pouvoirs discrétionnaires de la police

Une nouvelle attaque contre les familles des quartiers populaires

Alors que le taux de pauvreté s’élève à plus de 42% en moyenne dans les quartiers populaires, Macron propose de charger un peu plus des parents déjà acculés par le travail précaire, les bas salaires et l’inflation. Une attaque, qui passe par un renforcement de la criminalisation des quartiers populaires, à grand renfort de racisme et de xénophobie.

À l’image du récit du Parisien, dressant le tableau de quartiers dans lesquels l’autorité des « dealers » se seraient substituée à celle des parents, c’est l’imaginaire de la « décivilisation » qui est ici réactivé. En cause : des parents « désinvoltes » qui ne seraient pas capables de « tenir leurs enfants » et menaceraient la « moralité » républicaine. « Etre parent est une responsabilité qui, dans certains milieux, n’est pas un acquis » déclare ainsi Macron devant les maires qu’il a réuni à l’Elysée.

La bourgeoisie laisse éclater tout le mépris qu’elle a pour les plus précaires de sa société. Il transpire des déclarations de Macron, des politiciens et des juges, dans des audiences expéditives qui mènent à la prison : «  Pourquoi vous faites rien de vos journées ? Vous fumez du shit ? Vous jouez à la play c’est ça ? », attaquent ainsi les juges de Pontoise (95), « Vous gagnez quand même quelque chose, c’est quoi cette aide de la mission locale en plus de votre salaire c’est ça ? Vous êtes aidés ? Vous êtes aidés c’est ça ? Ah, on ne vous laisse pas à votre triste sort…  ».

Pour les riches, les pauvres ont toujours été incapables d’élever leurs enfants. Mais, le racisme colonial de la bourgeoisie française, a fait de la sanction des parents et des enfants, une véritable obsession. De la déportation d’enfants de la Réunion pour les envoyer en métropole, en passant par le discours de Chirac sur « le bruit et l’odeur » des familles immigrées qui ne feraient des enfants que pour les allocations, aux incitations de l’ARS à stériliser les femmes à Mayotte, les propos de Macron s’inscrivent dans une longue tradition raciste.

Une logique qui joue sur le spectre de l’immigration et de la fraude sociale qui, dans la continuité de la rhétorique développée par le gouvernement ces derniers mois, justifierait une intervention répressive l’État. La classe dominante prépare et cherche ainsi à légitimer une véritable contre-offensive en réponse aux révoltes.

Faire front contre les violences policières et le racisme d’État

Il est fondamental de dénoncer cette nouvelle attaque dirigée contre les quartiers populaires. Contre tous ceux qui veulent remettre en cause une société où la vie d’un Noir ou d’un Arabe compte moins que celle d’un Blanc, l’État et ses relais ne répondent que par les tirs du RAID, les peines de prison, et maintenant des amendes pour sanctionner toute une population que le gouvernement essaye de stigmatiser.

Face à la tentative de Macron de diviser par la répression, il faut s’inspirer de la solidarité et de la combativité incarnée par les collectifs de familles des victimes, bien souvent menés par des soeurs ou des mères, à l’image de la mère de Nahel, d’Assa Traoré ou d’Awa Gueye. Des femmes qui, face au meurtre de leur fils ou de leur frère, refusent de se plier à la discipline que le gouvernement entend imposer aux quartiers populaires et se battent pour la vérité et la justice.

Alors que Macron mène de front avec la droite et l’extrême-droite une véritable campagne pour criminaliser les familles, il est central de faire bloc autour de ces collectifs, comme l’a souligné Anasse Kazib lors de la marche blanche pour Nahel : « Il va falloir faire bloc autour de Mounia car ils vont essayer de la broyer comme ils ont essayé de broyer Assa. ».

Plus largement, alors qu’un véritable carnage judiciaire s’abat sur les jeunes des quartiers populaires, toutes les organisations politiques, syndicales et associatives doivent faire front pour dénoncer la répression et se solidariser avec la vague de colère qui a déferlé dans le pays.


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