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Transports

550€ de plus pour tous : les conducteurs de train allemands en grève pour les salaires

Face au refus de la direction de l'entreprise ferroviaire publique allemande de répondre aux cinq revendications légitimes des salariés, le syndicat des conducteurs de locomotive GDL appelle à la grève pendant 6 jours depuis mardi soir.

Dorian Maffei

24 janvier

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550€ de plus pour tous : les conducteurs de train allemands en grève pour les salaires

Crédits photo : Olj6810/Wikimedia Commons

Une grève historique qui répond à une dégradation des conditions de travail des cheminots

En décembre, 97 % des employés de la Deutsche Bahn (DB), la compagnie publique des chemins de fer allemands, syndiqués au Gewerkschaft Deutscher Lokomotivführer (GDL), le syndicat des conducteurs de trains, ont voté pour la grève illimitée après un accord très insatisfaisant signé par le dirigeant du principal syndicat des cheminots allemands (EVG) en août 2023, contre l’avis d’environ la moitié de la base de son propre syndicat.

Ainsi, le GDL appelle d’abord les travailleurs de la branche DB Cargo, travaillant dans le fret ferroviaire, à rentrer en grève ce mardi 23 janvier à 18 h. Le patronat craint particulièrement l’incidence sur le coût du transport de marchandises comme le souligne le journal du patron de CMA-CGM La Tribune. Le mercredi 24, à partir de 2 heures du matin, l’ensemble des salariés de la DB, ainsi que ceux travaillant à la City-Bahn de la région de Chemnitz (Saxe) sont appelés à les rejoindre.

La grève n’est pas illimitée puisque sa date de fin est déjà prévue au lundi 29 janvier à 18h. Néanmoins, si elle était menée à son terme, il s’agirait de la plus longue grève ferroviaire de l’après-guerre !

Les cinq revendications du GDL et les attaques de la direction

Dans un communiqué de presse publié lundi, le GDL dénonce une « troisième offre [de la direction] prétendument améliorée » qui s’inscrit en réalité dans la continuité de sa politique de refus des revendications. Face à ce mépris et la garantie que la direction continue de refuser de répondre aux revendications légitimes de ses salariés, le GDL n’ira pas négocier ce 25 janvier.

Le communiqué revient également sur la tentative infructueuse de la Deutsche Bahn de faire interdire la grève devant la justice, désignée comme une « attaque globale contre les syndicats de ce pays ». L’ensemble du patronat et des médias mènent ainsi campagne contre les grévistes pour essayer de remonter les usagers contre eux. Pourtant, la dégradation catastrophique des services de la DB (retards réguliers, accidents, annulations de train) sont de l’unique responsabilité de la direction et de l’Etat.

En opposition avec l’accord très partiel signé en août par le EVG, le GDL défend le « fünf für fünf », littéralement « cinq pour cinq » : cinq revendications pour les cinq groupes professionnels (conducteurs et autres travailleurs dans les trains, ceux qui gèrent les infrastructures, les employés administratifs et les apprentis) : 1) augmentation de salaire de 555 euros pour tous ; 2) réduction du temps de travail hebdomadaire de 38 à 35h pour les travailleurs postés, à salaire égal ; 3) prime défiscalisée de 3000 euros pour compenser l’inflation ; 4) cotisation de l’employeur à 5 % aux caisses de retraites de l’entreprise ; 5) une « semaine à cinq équipes » pour le travail posté, c’est-à-dire qu’un week-end de deux jours devrait obligatoirement suivre une rotation de cinq équipes (ou 120 heures).

Le GDL revendique que le tout s’inscrive dans un accord renégociable au bout d’un an au maximum, là où la direction souhaiterait un accord beaucoup plus long. En effet, dans un contexte de hausse des prix constante, un accord figé permet à l’employeur de laisser le salaire réel se réduire mécaniquement en refusant toute augmentation salariale à hauteur de l’inflation pendant la durée de l’accord.

Ainsi, l’accord signé en août par l’EVG comprenait une augmentation de 11 % du salaire étalée sur plus de deux ans, accompagnée d’une prime défiscalisée en octobre. Cet accord couvrant à peine l’inflation depuis 2022 devait en outre durer 25 mois ce qui, étant donné la poursuite de l’inflation, ne protège pas les salariés des baisses de salaire réel. Enfin, son application inégale qui divise les travailleurs selon leur poste, pénalise de nombreux travailleurs du rail notamment les apprentis. Pour ces raisons, il n’a été approuvé que par la moitié des travailleurs syndiqués à EVG.

De plus, tandis que les travailleurs voient leur salaire réel baisser, la direction s’accorde des primes et des hausses de salaire. Pour Sachar Schoner, syndiqué à GDL la direction « prêche l’eau en buvant du champagne ». Tandis qu’il refuse de répondre aux revendication des travailleurs, le dirigeant de la Deutsche Bahn Richard Lutz s’est offert une prime de 1,3 millions d’euros l’année dernière qui s’ajoute à son salaire de plus de 80 000 euros par mois. Il n’est pas le seul : d’autres responsables de la direction et des ressources humaines se sont aussi vu accorder des rémunérations très élevées.

L’issue de la grève dépend de l’auto-organisation des travailleurs grévistes

Ce nouvel épisode de grève dans le rail s’impose comme une nécessité pour les travailleurs face aux conditions de travail et de rémunération des travailleurs des chemins de fer allemands, mais aussi face à l’impasse du dialogue social qui a mené la direction du syndicat EVG à se plier en arrêtant la grève et en acceptant des concessions très faibles. Cette trahison a attisé la colère de la base même du syndicat et celle des autres travailleurs dont les attentes n’ont pas été respectées. Elle a aussi renforcé la direction de DB pour poursuivre son mépris des salariés et de leurs revendications.

Néanmoins, la grève des jours à venir révèle d’ores et déjà des faiblesses importantes. La date de fin est déjà fixée avant même qu’elle ne débute, ce qui la laisse aux mains de la direction du syndicat, alors qu’après l’expérience des derniers mois, c’est l’ensemble des grévistes qui devraient en avoir le contrôle. Ce sont les grévistes à la base qui ont intérêt à aller jusqu’au bout et à ne pas s’arrêter à mi-chemin. Leurs chances de succès pour arracher leurs revendications et plus encore dépendent de leur capacité à se réunir entre syndiqués et non-syndiqués, dans des assemblées générales qui puissent décider de la reconduite de la grève et de la manière de la mener jusqu’à la victoire.


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