Le 8 décembre 2018, Sophie Lacaille vient passer le week-end chez sa fille à Bordeaux. Alors qu’elles se promènent près de l’hôtel de ville où se déroulait l’acte IV du mouvement des Gilets jaunes, la quinquagénaire reçoit une balle de LBD dans la nuque et s’évanouit dans les bras de sa fille. Elle finit aux urgences.

D’après Le Monde, suite à cet événement, elle souffre de « séquelles et dommages corporels », d’un « retentissement psychologique », et des conséquences se font sentir sur son travail qu’elle finit par perdre.

Sa plainte contre X pour blessures involontaires est classée sans suite après que l’enquête de l’IGPN a conclu qu’il était impossible de retrouver le policier à l’origine du tir. Elle saisit alors la justice administrative en mettant en cause la responsabilité de l’État.

Dans son rendu du 23 février dernier, le juge administratif rejette une partie de la responsabilité sur la requérante : « Elle s’est maintenue à proximité des attroupements alors même qu’elle constatait une montée en puissance de la violence dans la ville et ne pouvait ignorer les graves incidents intervenus au cours des semaines précédentes à l’occasion de manifestations de “gilets jaunes”  ». Sa conclusion : Sophie Lacaille aurait commis « une imprudence fautive » et « cette faute est de nature à exonérer partiellement l’Etat de sa responsabilité à hauteur de 25 % ».

De plus, toujours d’après Le Monde, le juge administratif a divisé par dix le montant demandé par la victime au titre de la réparation des préjudices causés et du remboursement des frais liés au litige. Il a notamment estimé que la perte de son travail n’était pas en lien direct et certain avec « l’accident ».

Si le principe du « partage de la responsabilité » est régulièrement utilisé contre les manifestants, le cas de Sophie Lacaille illustre toute la violence d’une justice qui sert à masquer les violences d’Etat, prête à incriminer des victimes de violences policières pour le simple fait d’avoir été dans la rue au moment des tirs. Une situation qui ne peut faire oublier que la responsabilité pleine et entière des centaines de vies brisées par les violences et les mutilations policières revient à l’État.

Quatre ans après le mouvement des Gilets jaunes et dans le contexte de l’offensive répressive du gouvernement, la décision du tribunal administratif n’est pas anodine. À l’heure où Macron entend réprimer toutes celles et ceux qui contestent son passage en force, la construction d’un front le plus large possible contre la répression est l’une des tâches prioritaires du mouvement ouvrier pour faire face à toutes les attaques du gouvernement et du patronat.

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