Corinne B. a le souffle court, et des difficultés à parler. 15 jours après sa sortie du service de réanimation, elle commence à peine à se tenir assise. “J’étais très étonnée d’être encore en vie” avoue-t-elle. “Moi je pensais que j’étais carrément morte, et qu’on m’avait fait revenir.” Elle respire aujourd’hui grâce à un trou dans sa gorge.

Corinne est directrice d’un pôle médico-social pour personnes handicapées, où elle a travaillé auprès de personnes manifestement atteintes du Covid-19, sans protection, et où elle a sans l’ombre d’un doute contracté le virus.

Sa voix se brise lorsqu’elle évoque les conditions de soins dans son lieu de travail. “On a soigné des gens dans des conditions précaires. À une période où il n’y avait pas de protection.

Des fois, ça prenait une nuit entière au téléphone, pour avoir le 15, pendant que les gens, dans leurs chambres, étaient en train de mourir. C’était dur de leur dire au revoir sans les accompagner”.

Combien de morts évitables ? Combien de personnes handicapées, âgées, malades, précaires, mises au rebut de la société, ont été ainsi “triées” par des urgences surchargées et manquant de moyens ? Combien de soignants et personnels sacrifiés par manque de protection ? Ces personnes sont-elles des “morts acceptables” ?

Dans le secteur médico-social, qui manque de soignants et de protections, on dénombre plus de 9 000 décès, en grande majorité dans les Ehpads. Si Corinne a survécu, elle gardera des séquelles de cette maladie, notamment ce trou dans la gorge, pendant des semaines, voire des mois.