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Enseignante menacée à Issou : Attal instrumentalise l’affaire et se rêve en Darmanin de l’éducation

Le ministre de l'Éducation nationale s’est rendu ce lundi au collège Jacques Cartier d'Issou, suite aux menaces dont a fait l'objet une enseignante après avoir montré en classe un tableau sur lequel figurent plusieurs nus féminins. Se saisissant de l’affaire, le ministre, loin de lutter contre les violences à l’école, ne fait qu’attiser les tensions pour mieux justifier son offensive autoritaire

Hélène Angelou

15 décembre 2023

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Enseignante menacée à Issou : Attal instrumentalise l'affaire et se rêve en Darmanin de l'éducation

Crédits photo : Annonces de Gabriel à Attal à Issou/BFMTV

Ce lundi, le ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal, se rendait au collège Jacques Cartier d’Issou dans les Yvelines, suite aux menaces dont a fait l’objet une enseignante, après avoir montré en classe un tableau sur lequel figurent plusieurs nus féminins. Face aux personnels en colère, ayant exercé leur droit de retrait vendredi 8 et lundi 11 décembre, le ministre n’a pas tardé à instrumentaliser la situation pour revendiquer sa politique autoritaire et répressive à l’école.

A Issou, Attal se rêve en Darmanin de l’éducation

Il a ainsi annoncé, le soir même de sa visite, l’ouverture d’une « procédure disciplinaire à l’endroit des élèves qui sont responsables de cette situation et qui ont d’ailleurs reconnu les faits ». Une gestion à nouveau révélatrice du tout répressif qu’Attal impose à l’école.

Des déclarations scandaleuses à deux titres. D’une part, car en déclenchant lui-même des mesures disciplinaires, Attal ne fait ni plus ni moins que court-circuiter les procédures bureaucratiques de l’Éducation nationale. Une situation qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler la décision unilatérale du ministre d’exclure des établissements certains élèves, suite à la journée d’hommage à Samuel Paty et Dominique Bernard. D’autre part parce qu’elle vise à monter en épingle cette affaire afin de légitimer sa politique autoritaire.

A ce titre, Gabriel Attal a très vite profité de la situation pour en faire une vitrine de sa politique. Il l’a ainsi revendiqué devant l’Assemblée nationale, lors des questions au gouvernement : « Je le redis ici devant vous, comme je l’ai dit hier aux enseignants d’Issou où je me suis rendu, au collège Jacques Cartier, jamais je n’accepterai à l’école de la République qu’on refuse de regarder un tableau, qu’on se bouche les oreilles dans un cours de musique, qu’on s’en prenne à l’autorité d’un enseignant ». Avant d’inscrire cette gestion dans la droite ligne de sa politique : « Sous l’autorité de la première ministre et du président, j’ai décidé d’interdire le port de la abaya et du qamis à l’école et j’ai fait respecter cette interdiction. C’est pour cela que j’ai décidé de sanctionner les élèves qui ont contesté le moment d’hommage à la mémoire de Samuel Paty et de Dominique Bernard et que ces élèves ont été sanctionnés. C’est pour cela que j’ai dit dès hier que les élèves responsables de cette situation à Issou seraient sanctionnés, et je vous annonce que ce matin, une procédure disciplinaire a été ouverte à l’endroit des trois élèves à l’origine de cette situation ».

Une tour de vis sécuritaire qui renforce la violence sociale à l’école

En effet, si la colère des enseignants face aux menaces subies est entendable, la politique répressive et la fermeté affichée par le ministre sont loin de constituer une réponse. Elles ne font à l’inverse que renforcer la violence sociale qui s’exerce à l’école.

Loin d’une politique sécuritaire, c’est encore une fois d’une question de moyens dont il s’agit. « Ce n’est pas la laïcité le point déclencheur de cette situation, ce sont les moyens ! », pointe en ce sens Alex Berasategui, principal dans un collège des Yvelines et secrétaire départemental du SNPDEN (Syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale), interrogé par Médiapart dans le cadre d’une enquête. Celle-ci révèle un taux d’encadrement des élèves extrêmement insuffisant dans l’établissement et précise que le principal du collège Jacques Cartier a dénoncé cette situation dans un courrier d’alerte adressé à la direction académique des Yvelines, et consulté par Médiapart :

« Ce courrier décrit des "situations de mal-être d’élèves qui explosent en raison de problèmes d’insultes subies, de menaces, de violences physiques, de traitements dégradants ou humiliants, d’incitation à la haine, de refus scolaire anxieux, de problématiques personnelles", évoque des "courriers de menaces de mort et de viol" circulant entre des élèves, des "bagarres et faits de violence multiples" », précise l’article.

Une situation qui illustre à quel point la "violence" à l’école est avant tout une violence sociale subie par les élèves, dans et en dehors de l’école. Celle-ci est non seulement une caisse de résonance des inégalités et des violences sociales que subissent les familles des élèves, mais elle contribue aussi à les reproduire. Une violence aggravée par la baisse des moyens et la casse du service public. Cela pointe dans le même temps l’hypocrisie de l’institution et du ministre, qui s’affiche aujourd’hui au chevet des enseignants, tout en continuant à démanteler l’Education nationale.

Face à l’offensive autoritaire, il faut une réponse !

S’il ne s’agit pas d’un fait nouveau, l’offensive autoritaire menée par Gabriel Attal – d’ailleurs dans la lignée de la politique du gouvernement en général – contribue à exacerber cette violence sociale. Depuis le début de son mandat, Gabriel Attal a fait du retour de « l’autorité » à l’école son cheval de bataille et impose la fermeté la plus dure aux élèves. L’objectif, d’ailleurs assumé par le gouvernement, est de faire de l’école un pilier de la répression des révoltes de l’été dernier.

La politique du ministre n’a de cesse de stigmatiser les élèves, à travers une politique raciste et islamophobe qui fait des élèves des suspects potentiels, tout en entendant faire des enseignants les garants de la « République » et des « valeurs républicaines » en les dressant en « rempart » face aux élèves. Une rhétorique qui contribue à dresser personnels de l’éducation et élèves les uns contre les autres et à faire des premiers des auxiliaires de la répression exercée à l’encontre des élèves.

Cette rhétorique réactionnaire que le gouvernement justifie en instrumentalisant les meurtres de Samuel Paty et de Dominique Bernard, doit être combattue par l’ensemble des personnels de l’éducation. Alors que les directions syndicales de l’Éducation ont accompagné ce tour de vis sécuritaire après le meurtre de Dominique Bernard, il y a urgence à opposer une alternative afin de ne pas normaliser ce climat de suspicion généralisée envers les élèves.


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