Le départ d’Oudea-Castera n’y changera pas grand-chose : la colère est forte dans l’éducation nationale. A Bordeaux, celle-ci a pu être mesuré ces dix derniers jours à l’occasion des différentes mobilisations.

Une mobilisation massive le 1er février

La manifestation du 1er février a été très important pour le secteur dans la ville girondine, avec pas moins de 3 000 personnes dans la rue, dont une très grande majorité de travailleurs de l’éducation, qui ont défilé entre de la place de la Bourse et le rectorat. Pour cette journée, les syndicats décomptent près de 41,5% de grévistes en Gironde, dont 53% en collège, tandis que la FSU revendique 40% de grévistes en primaire.

Durant cette manifestation Olivier, syndicaliste CGT éduc, a exprimé ses sentiments au micro de Révolution Permanente : « je suis là pour montrer mon ras le bol contre les politiques éducatives menées depuis des années. On se fait marcher dessus à tous les niveaux, ça suffit ! Il faut une révolte ».

Une dynamique qui s’est poursuivie cette semaine

Cette dynamique s’est poursuivie au cours de la semaine avec des rassemblements successifs devant le rectorat, rassemblant des personnels conscients qu’une seule journée de manifestation ne suffira pas. Sur place, les craintes et la colère contre le projet réactionnaire du gouvernement Attal pour l’école, et notamment sa volonté de mettre fin au collège unique, se sont exprimées.

A ce titre, mardi 6 février, 200 enseignants, pour la plupart issus de collèges, se sont réunis devant le rectorat de Bordeaux, et plusieurs d’entre eux ont témoignés au journal Sud Ouest. Thomas, professeur au collège Montaigne (Lormont) explique : « On est d’abord là pour les élèves. Ces groupes de niveau vont les stigmatiser et ça va créer un problème d’organisation, alors qu’on manque de moyens humains […] Ceux qui sont dans le groupe des « faibles » vont se refermer sur eux-mêmes ».

Parmi les personnels mobilisés, les assistants d’éducation (AED) et les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH), des métiers particulièrement précaires, étaient également mobilisés. Une mobilisation qui atteint des niveaux inédits dans certains établissement, notamment au lycée hôtelier de Gascogne à Talence, où l’internat a été contraint de fermer ses portes lundi soir, l’écrasante majorité du personnel étant en grève. A notre micro, Nicolas, AED au lycée hôtelier explique qu’il se mobilise d’abord par soutien aux professeurs, mais également « pour porter les valeurs des assistants d’éducation, des AESH et contre la précarité dans l’Education nationale ». Olivier, AED dans le même établissement explique que « l’éducation nationale est, comme les hôpitaux, les services publics, mise à mal par Macron ».

Une mobilisation particulièrement suivie dans les collèges

Dans le département, les établissements présentant le plus fort taux de grévistes et une mobilisation active sont les collèges des quartiers populaires de la banlieue bordelaise. À l’image du collège Grand Parc et du collège Clisthène, où le taux de grévistes s’élevait à 53 % le mardi 6 février. Ces établissements accueillent une grande majorité d’élèves issus de milieux populaires, et pour la plupart issus de l’immigration. Interviewé par Révolution Permanente Bordeaux, Bastien, enseignant spécialisé dans ce collège, explique que sa mobilisation et celle de ses collègues se fait contre « les classes de niveaux au collège, qui sont une forme de séparatisme scolaire ».

D’autres établissements, comme le collège Max Linder (Saint-Loubès) et le collège Cassignol (Bordeaux), ont connu une mobilisation importante toute au long de la semaine. Dans ce dernier, sur les 25 professeurs que compte l’établissement, 20 étaient en grève. Un professeur de l’établissement explique lui aussi que la mise en place de groupes de niveaux au collège est l’un des principaux motifs de leur colère. « Le principe même des groupes de niveaux et la ségrégation de nos élèves est inadmissible. Ce dont on a besoin c’est de classes à 25 ». Le jeudi 8 février, le collège Max Linder à quant à lui fait une journée « collège mort » qui a été particulièrement suivie.

Construire la lutte pour que les revendications pour l’école ne restent pas lettre morte

Le remplacement de la ministre montre l’ampleur de la crise qui s’est ouverte dans l’Education, entre casse de l’école publique et mise à mort du collège unique. Dans ce contexte, et alors que la nomination d’une nouvelle ministre vise à faire redescendre la colère des personnels de l’Education, l’enjeu est de poursuivre, de renforcer et d’étendre la mobilisation, face à un gouvernement qui n’est pas prêt de renoncer à ses projets pour l’école.

Pour cela, l’organisation des personnels de l’éducation depuis leurs établissements, au travers d’assemblées générales, qui puissent ensuite se coordonner dans la mobilisation, est cruciale pour imposer les revendications des travailleuses et travailleurs du secteur pour l’école publique, et exiger des directions syndicales un plan de bataille conséquent pour construire un véritable rapport de force. Une mobilisation à laquelle associer aussi familles et élèves, qui seront, et plus encore dans les quartiers populaires, eux aussi en première lignes des attaques de Macron/Attal/Belloubet.