La réforme du Code du Travail en 2018 avait déjà fait passer le délai de recours dont dispose un salarié licencié pour se retourner contre son entreprise de trois à un an, Bruno Le Maire vient d’annoncer au Parisien vouloir l’abaisser à deux mois. Cette mesure s’inscrirait cyniquement dans l’objectif d’atteindre le « plein-emploi en 2027 », puisque c’est bien connu : faciliter les licenciements réduit le chômage. Mais cette décision s’inscrit en fait plus largement dans l’élaboration de la « loi Pacte II », qui sera présentée début 2024 selon le Parisien et visera à « accélérer le désendettement » et à « transformer notre modèle social ». Le journal rappelle surtout le lien entre cette nouvelle loi et les injonctions des agences de notation, Standard & Poor’s en tête, à rendre la France plus attractive pour les investisseurs étrangers, en réduisant la dette et en cassant le modèle social français.

L’agence vient en effet de rendre son rapport annuel, dans lequel elle a critiqué une « incertitude » concernant les « finances publiques de la France dans un contexte de déficit budgétaire élevé, quoiqu’en baisse lente, et d’une dette publique élevée ». Ce genre d’agences privées a pris ces dernières décennies une place prépondérante dans les politiques économiques de la France, et le gouvernement s’en sert comme justification pour continuer de s’attaquer aux conquis sociaux. En effet, Bruno Le Maire a ainsi revendiqué avoir « engagé des transformations profondes de notre modèle économique : réforme de la fiscalité du capital et du marché du travail, loi Pacte pour simplifier la vie des entreprises, réforme des retraites, assurance chômage » ; des engagements qui vont dans le sens du rapport de cette agence de placement financier.

Concernant la réduction du délai de recours pour les salariés licenciés, Bruno Le Maire a déclaré qu‘ « il faut des mesures drastiques de simplification pour les entreprises. Les TPE comme les PME, ETI (entreprises de taille intermédiaire) ou grands groupes n’en peuvent plus de la paperasse et de la lourdeur des procédures. Aujourd’hui, lorsque vous licenciez une personne, un recours contre l’entreprise reste possible pendant douze mois ». L’objectif est donc de réduire la portée de la justice au profit du diktat des patrons, dont les entreprises seraient pressurisées par « la paperasse » et « la lourdeur des procédures ». Cette loi vise en fait avant tout à faciliter les licenciements. Autrement dit, l’objectif est de précariser les travailleurs et d’en faire une vulgaire variable d’ajustement.

Sous couvert de résoudre la crise économique et de réduire le chômage, le gouvernement multiplie en fait les cadeaux aux entreprises et au patronat en appliquant une politique ultra-libérale dictée par des agences de placements financiers. Hier il s’agissait du report de l’âge de départ à la retraite, aujourd’hui il s’agit de grandement limiter nos droits à contester notre licenciement, demain une autre « loi d’ajustement » sera élaborée pour accélérer la casse nos droits et faire plaisir aux patrons. Une réduction de l’indemnisation chômage pour les séniors serait d’ailleurs dans les cartons du ministre. Une fois de plus, il est nécessaire d’opposer dans la rue et sur nos lieux de travail une réponse systématique à ces attaques contre nos acquis, alors que les entreprises multiplient les profits et que nos salaires sont toujours plus rognés par l’inflation. L’ensemble du mouvement ouvrier, et en particulier les directions syndicale brillant de leurs passivités ces derniers mois, doivent réagir. Ne nous laissons pas faire !