La menace est à peine voilée. Auditionné au Sénat au sujet de la « gestion du maintien de l’ordre » lors des dernières manifestations, notamment lors de la mobilisation contre le projet de méga-bassine à Sainte-Soline le 25 mars, Gérald Darmanin a laissé entendre que les subventions accordées à la Ligue des droits de l’homme (LDH) pourraient être remises en cause. « Je ne connais pas la subvention donnée par l’Etat, mais ça mérite d’être regardé dans le cadre des actions qui ont pu être menées » a déclaré le ministre de l’Intérieur.

L’intervention de Darmanin a été faite en réponse au sénateur LR François Bonhomme, qui l’interpellait : « il faut cesser de financer des associations qui mettent en cause gravement l’Etat – elles dénoncent un Etat policier, une violence systémique. On finance ces associations qui n’ont rien à voir avec l’Etat de droit, quoi qu’elles en disent ». Une politique dans la droite lignée du programme de Le Pen.

Ces dernières années, les coupures de subvention à la LDH ont notamment été une des priorités du FN/RN. Une obsession historique de l’extrême droite puisque le régime de Vichy était parvenu à dissoudre la LDH. Une des premières mesures de la municipalité FN à Hénin-Beaumont en 2014 avait ainsi été de priver l’association de subvention et de son local. Idem à Mantes-la-Ville en 2015.

Mais, la même année, c’était également un certain Gérald Darmanin, alors maire UMP de Tourcoing, qui avait menacé de couper la subvention municipale à la LDH. Le président de la section locale de la LDH dénonçait alors déjà des « procédés visant à récupérer le maximum de voix parmi les sympathisants du Front National ».

Aujourd’hui, dans le viseur de Darmanin et de la droite, les alertes et critiques réitérées de la LDH à propos de la répression brutale des manifestants ces dernières semaines. En particulier, le fait que la LDH envoie des observateurs dans les manifestations pour rendre compte des pratiques de la police. Dans un communiqué, la LDH dénonce la « mauvaise foi » de Darmanin et « sa détermination à piétiner la liberté d’expression ».

Quelques jours après avoir assimilé la dénonciation des violences policières à du « terrorisme intellectuel » dans un entretien donné au JDD, Gérald Darmanin persiste et signe, en même temps qu’il menace d’un nouveau saut dans la criminalisation du mouvement en cours et dans l’offensive autoritaire ouverte ces derniers jours.

Ce qui se dessine est en effet une large offensive autoritaire qui ne fait que commencer. L’annonce des projets de dissolution des Soulèvements de la Terre et de la Défense collective rennaise, les interdictions de manifester à la pelle, l’annonce ce mardi du lancement d’une commission d’enquête par les députés Renaissance et Horizons sur les récentes « manifestations illicites et violentes », vont dans ce sens.

Après avoir stigmatisé et attaqué des organisations présentées comme « factieuses » ou « ultra-gauche », Darmanin prépare les esprits à ce que quiconque critique les violences policières et sa politique de terreur contre les mouvements sociaux soit menacé de représailles. Dans le contexte de répression et d’offensive autoritaire latente, l’urgence est de faire bloc contre ces attaques. Alors que l’intersyndicale reste bien silencieuse à ce sujet, en même temps qu’elle ménage une porte de sortie à l’exécutif en donnant des gages à sa mise en scène de « dialogue social », il faut se mobiliser partout contre les attaques faites aux organisations et aux grèves.

Le mouvement ouvrier et la jeunesse ont montré leur rage face à l’autoritarisme de la Vème République et de Macron, généralisons la grève pour leur faire remballer leurs mesures anti-sociales et liberticides.