Vendredi dernier, une enseignante de maternelle du quartier des Hauts de Chambéry (73), classé Réseau d’Éducation Prioritaire +, a dû passer un entretien afin de conserver un poste qu’elle occupe depuis 20 ans. Ayant obtenu l’appréciation « favorable », insuffisante pour l’institution, elle devra quitter ce poste à la rentrée. Dans un élan très rapide de colère et de solidarité, une cinquantaine d’enseignant·es ont décidé collectivement de faire grève dès ce mardi 9 avril, avant de se réunir en assemblée générale hier matin pour échanger sur les suites de la mobilisation.

Dans les écoles du secteur, un soutien spontané et majoritaire contre une institution maltraitante

Les Hauts de Chambéry, quartier prioritaire de la ville, compte une dizaine d’écoles maternelles et élémentaires, soit plus de 1 000 élèves et près de cent professeurs des écoles. D’après le SNUIPP, plus de la moitié des collègues de REP+ se sont ainsi mis en grève ce mardi, en soutien à leur collègue, et pour dénoncer, plus largement, « l’injustice des règles du mouvement intra académique » et le traitement imposé aux enseignant·es par l’administration.

Au-delà du cas individuel de cette collègue, qui n’est malheureusement pas un cas isolé, c’est bien une gestion des personnels hors sol et maltraitante qui est dénoncée dans le communiqué rédigé hier par les grévistes (en Annexe). Ils y pointent les règles arbitraires des entretiens, et des mesures qui déstabilisent les équipes, tout en venant remettre en cause l’autonomie des enseignant·es, sous pression de l’institution.

Une gestion arbitraire et « au mérite » des personnels, à laquelle s’ajoute le manque de moyens humains (remplaçants, AESH, psychologue scolaire, enseignant·es spécialisé·es…) particulièrement criant dans des zones défavorisées, mettant en difficulté les élèves comme leurs professeurs.

Une mobilisation à l’initiative des enseignant·es, qui appellent désormais les parents à les rejoindre

Impulsée par les enseignant·es,la mobilisation a donné lieu à une première assemblée générale, dans laquelle une cinquantaine de grévistes se sont réunis. Il a été décidé qu’une délégation du collectif de grévistes, accompagnée de deux représentants syndicaux, rencontrerait le Dasen aujourd’hui, à 17h30. À cette occasion, un rassemblement devant le bâtiment de la DSDEN est lui aussi prévu. De plus, les grévistes souhaitent associer les parents d’élèves à la mobilisation, et proposent une réunion avec eux demain soir, jeudi 11 avril.

Après la grève spontanée avec assemblée générale, cette rencontre parents-professeurs a pour objectif de construire la mobilisation en lien avec les familles, qui sont elles aussi victimes des politiques managériales de l’institution. Alors que les attaques contre l’école se multiplient, notamment au travers de la réforme du « choc des savoirs », la mobilisation des enseignant·es des Hauts-de-Chambéry donnent à voir un aspect supplémentaire des politiques de destruction de l’école publique et de mise au pas des personnels, comme des élèves.

Tout en refusant de laisser nos collègues seuls face à l’institution, il est ainsi nécessaire, comme le pointent les enseignant·es mobilisées, de « construire ensemble une suite à ce mouvement » pour faire entendre nos revendications, en allant chercher nos collègues, mais aussi avec les élèves et leurs familles.

Annexe : Message des grévistes aux collègues

Chers collègues,

Aujourd’hui, mardi 9 avril, certains collègues du REP+ de Chambéry se sont réunis en Assemblée Générale dans le cadre d’un mouvement de grève spontané. Depuis plusieurs années, de nombreux collègues sont victimes de l’injustice des règles du mouvement intra-académique.

C’est le cas de nouveau aujourd’hui pour une collègue à l’école maternelle Vert Bois. Nous dénonçons et demandons l’arrêt des entretiens permettant l’accès aux postes à exigences particulières sur le dispositif des classes dédoublées en REP et REP+ :

  •  pour plus de justice
  •  pour respecter les règles d’ancienneté dans l’école
  •  pour stabiliser les équipes
  •  parce qu’aucune directive ministérielle ne spécifie que les postes du dispositif des classes dédoublées nécessitent un entretien
  •  pour dénoncer l’insécurité qui engendre un mal-être profond au niveau personnel (à ce jour, tout le monde peut être concerné par ces règles arbitraires). Il est absolument anormal de repasser des entretiens alors que nous sommes toutes et tous titulaires et jugés aptes à enseigner de la TPS au CM2 en REP, REP+ et ailleurs.

    Ces entretiens remettent en cause nos compétences, notre professionnalisme, hors contexte classe et en quelques minutes. Toutes ces mesures qui apparaissent années après années empiètent sur notre autonomie (liberté pédagogique, choix de nos postes, transformation des écoles en établissement...).

    Une délégation composée de collègues du REP+ sera reçue à la DSDEN avant les vacances. Une réunion d’information ouverte aux parents et enseignants, aura lieu jeudi à 18h30 au centre social des Combes.