Le Grand Débat du 4 avril a été un déclic. « Vous les avez rincé, M. Poutou, il manquait plus que les serviettes » lance une femme, la cinquantaine, sur la place du marché de Saint-Denis, à l’adresse du candidat anticapitaliste venu y tourner un spot de campagne. Les félicitations et messages de soutien affluent pour le candidat, mais aussi pour n’importe quel militant du NPA. C’est comme un souffle d’air qui a balayé la campagne : un ouvrier, ce n’est pas là pour fermer sa gueule ! C’est à substance ce qu’a envoyé Poutou, mardi soir dernier, à François Fillon, mais également à Emmanuel Macron et Marine Le Pen, celle qui prétend représenter la détresse du monde ouvrier et qui n’a rien su répondre face à « l’absence d’immunité ouvrière » brandie par Philippe Poutou contre l’ « immunité parlementaire » dont elle jouie.

La campagne du NPA est depuis sous les feux des projecteurs et des grands médias. Pas toujours en sa faveur, comme le montrent les éditos particulièrement agressifs d’un Zemmour ou d’un Ferry, ou les railleries du clan Le Pen à l’encontre du candidat-ouvrier. Mais tout cela a au moins le mérite de clarifier certaines choses : l’engouement pour la figure de Philippe Poutou suscite des réactions épidermiques parmi les rangs de la bourgeoisie et de ses chiens de garde, autant qu’au Front National. Depuis le camouflet infligé à Marine le Pen, le profil anti-ouvrier et antisyndical du FN, son véritable visage dans la plus pure tradition de l’extrême-droite française, suinte et fait tomber le masque d’un populisme aguicheur.

Ces attaques, répétées et ciblées, ont en réalité participé à maintenir la sympathie pour Philippe Poutou au plus haut, et cela y compris une semaine après sa désormais fameuse sortie sur « l’immunité ouvrière » à l’antenne de BFM-TV et de C-News. Il faut dire que lorsque le mépris de classe s’exprime à découvert, il en dit long sur les rapports de classes qui traversent notre société, sur la nature même de cette élection présidentielle et la facétie démocratique qui l’entoure. Et la dynamique de campagne a su joué sur cet effet là. En parodiant la scène de fou rire de Vanessa Burgaff sur le plateau d’On N’est Pas Couché, véritable démonstration en la matière, le premier clip de campagne diffusé ce lundi 10 avril sur France 2 a eu son petit effet dans la presse. Tout comme pour le deuxième, la communication du NPA pour cette campagne joue sur l’originalité pour faire passer ses idées et montrer que le combat révolutionnaire et anticapitaliste n’est en rien à rebours de la révolution numérique.

Les réseaux sociaux ont largement accompagné cette dynamique : Poutou, star de Tweeter lors du Grand Débat, a été le candidat le plus mentionné sur le réseau social ; son nom, après celui de Jean Lassalle, le plus recherché sur Google, Enfin, des initiatives, pour le moins décalées, fleurissent sur youtube, à l’image de cette vidéo de Filip Flatau.

Au-delà de la sympathie, il s’agit maintenant que ces idées prennent corps et s’incarnent dans les urnes et se préparent dans la rue. Car, contrairement à l’illusion d’un « vote utile » qui fait croire qu’il est possible de faire passer une révolution dans les urnes, de changer de système tout en s’y pliant, Poutou propose une autre voie, qui a l’avantage de l’honnêteté. « On ne va pas se mentir, cette élection ne changera pas nos vies. Mais voter pour un ouvrier et un programme anticapitaliste, c’est leur dire qu’on ne se laissera pas faire, et qu’après les élections, ça ne va pas s’arrêter. » Fait d’ailleurs passé plutôt inaperçu, depuis l’intervention de Poutou lors du débat à 11, celui-ci est passé de 0,5% à 2,5% des intentions de vote...