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Casse de l’éducation

Toulouse. 90 % de grévistes au collège Clémence Isaure pour dénoncer le manque de moyens

Jeudi 28 mars, 90% du personnel éducatif du Collège Clémence Isaure à Toulouse était en grève contre le manque de moyens et la casse de l’éducation. Une mobilisation locale forte qui s'inscrit dans un contexte plus global d'une colère de fond dans l'éducation nationale.

Correspondant-e

1er avril

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Toulouse. 90 % de grévistes au collège Clémence Isaure pour dénoncer le manque de moyens

A Toulouse, les personnels du collège Clémence Isaure étaient massivement mobilisés ce jeudi 28 mars. Ils étaient plusieurs dizaines à se rassembler dès 8 heures du matin devant le collège enregistrant une mobilisation inédite avec 90 % du personnel éducatif en grève. Ils étaient accompagnés dans leur combat par plusieurs élèves et leurs parents venus en soutien.

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A l’origine de la colère, des personnels en sous effectif et en souffrance dans un établissement qui accueille près de 800 élèves. En effet, de nombreuses absences ne sont pas remplacées, les dispositifs ULIS et UPE2A sont surchargés, l’établissement comptabilise sept abandons de postes et démissions et trois arrêts maladies suite aux conditions de travail. Comme le raconte à notre micro deux enseignants et un agent du collège : « des professeurs craquent moralement au vu des difficultés et beaucoup d’élèves sont aussi en situation de souffrance, ça fait plus de 8 ans que le rectorat est alerté de notre situation à Clémence Isaure. Il y a eu de nombreuses alertes, là on en peut plus, il est temps d’agir ! ».

Lors du rassemblement, des professeurs détaillent les problématiques qu’ils rencontrent au quotidien : « Il y a des élèves qui ont besoin du dispositif ULIS mais le manque de moyens fait que la classe ULIS est déjà surchargée, ils sont donc mis dans des classes qui ne sont pas adaptées à leurs besoins. Il y a une seule professeure pour s’occuper de 16 élèves ! Elle fait des semaines à rallonge entre 50 et 60 heures de travail, aussi le week-end, pour suivre au mieux les élèves et assurer le lien indispensable avec les familles ». Autre témoignage poignant, une AESH raconte : « je travaille à côté de mes études, j’ai un contrat de 24 heures par semaine et je dois accompagner 9 élèves. Ça veut dire que j’ai moins de 3 heures par semaine à leur accorder, je ne peux pas les accompagner correctement. Je suis dépitée, je n’ai plus les mots.. ».

Ainsi, les grévistes dénoncent la casse de l’éducation et revendiquent, entre autres, le passage de l’établissement en REP (Réseau d’Education Prioritaire), la limitation des effectifs par classe à 24, l’orientation des élèves notifiés vers les dispositifs ULIS, UP2EA avec les moyens humains nécessaires pour les accueillir, l’augmentation des moyens matériels et humains dans les différentes composantes de l’établissement, la rénovation des bâtiments dont certains peuvent atteindre 40°C dès mai.

Des revendications auxquelles se joignent des parents d’élèves, comme l’exprime un père lors de l’assemblée générale expliquant que sa fille n’a pas eu cours de français depuis le début de l’année car la professeure n’a jamais été remplacée. Un autre parent d’élève présent lors du rassemblement et membre de la FCPE 31 témoigne au micro de Révolution Permanente de son soutien au mouvement de grève : « On veut que tous les enfants, favorisés et défavorisés, soient dans de bonnes conditions pour étudier donc il faut que les enseignants soient dans des conditions optimales pour qu’ils puissent donner le mieux à leurs élèves. La question des moyens c’est une question politique, on nous dit qu’il n’y a pas assez de dotations et ils s’en servent pour donner à l’un en prenant à l’autre. C’est inacceptable !  ».

Après un temps de rassemblement devant l’établissement, une quarantaine de grévistes et plusieurs parents d’élèves se sont réunis en assemblée générale pour discuter de la rencontre qui avait eu lieu la veille entre des personnels et le rectorat, accompagné de la directrice académique des services départementaux de l’éducation nationale. Des négociations qui ont débouché sur de belles paroles promettant une vigilance accrue, faisant mine de découvrir la situation du collège, alors que le personnel dénonce depuis des années des alertes sans réponse et a adressé un courrier détaillé au rectorat sur les conditions de travail et les revendications de la mobilisation.

Face à la colère, le rectorat a seulement garanti la production d’un dépliant pour rendre le collège attractif afin de répondre aux problèmes de fuite des familles préférant mettre leur enfant dans le privé plutôt que subir la dégradation de l’école publique. Une promesse qui a fait autant rire que scandalisé l’assemblée de grévistes. Quant à la revendication de passer en REP, il a été répondu qu’il fallait bien réfléchir à cette revendication car cela pouvait faire baisser le coût de l’immobilier du quartier. Des réponses qui montrent une fois de plus le mépris du rectorat pour les conditions de travail et la souffrance du personnel.

Après quelques heures de discussion en assemblée générale, les grévistes ont décidé d’adresser un message fort au rectorat, celui-ci a jusqu’au vendredi 5 avril pour répondre aux revendications, si les revendications ne sont pas accordées le personnel a décidé de ne pas reprendre le travail à la rentrée. « Pas de moyens, pas de rentrée ! ». Ils ont aussi voté à l’écrasante majorité contre la mise en place des groupes de niveaux que souhaite instaurer la ministre Nicole Belloubet. Une détermination remarquable, appuyée par les parents d’élèves qui ont lancé une pétition de soutien au mouvement de grève.

La colère des personnels du collège Clémence Isaure s’inscrit dans la continuité des mobilisations que connaît le secteur depuis plusieurs mois. En effet, les travailleurs de l’éducation nationale font face à des attaques anti-sociales et mènent de nombreuses mobilisations, notamment en région parisienne. Grèves reconductibles, occupation du rectorat de Versaille, manifestations, assemblées générales : les personnels, les élèves et leurs parents se mobilisent notamment contre les récentes coupes budgétaires dans l’éducation nationale (692 millions d’euros supprimés lors des dernières vacances scolaires) et plus largement contre le manque de moyens humains et matériels orchestrés par le gouvernement. Le récent décret sur les groupes de niveaux au collège qui vise à trier les élèves vient d’autant plus alimenter la colère des enseignants.

Dans ce contexte, l’urgence est à l’élaboration d’un véritable plan de bataille à échelle nationale qui soit à la hauteur de la profonde colère qui anime le secteur de l’éducation. Alors que la colère persiste, comme le montre les grèves qui se multiplient sur des revendications locales, c’est en cherchant à amplifier et à généraliser ces dynamiques à la base, et en interpellant les directions syndicales pour un plan de bataille d’ampleur nationale qu’il sera possible de construire une grève dure. La nouvelle journée de mobilisation du 2 avril appelée par les directions syndicales de l’éducation reste insuffisante pour réellement plier le gouvernement et arracher des revendications d’ensemble.


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