L’Amérique latine est considérée comme la région la plus dangereuse pour les militants et militantes écologistes. Selon un rapport de l’ONG Global Witness, 116 défenseurs de l’environnement ont été tués en 2014. Parmi eux, 87 se trouvaient en Amérique du Sud. Le Brésil et la Colombie arrivent en tête de ce sinistre classement. En 2015, les meurtres ont encore augmenté, portant le nombre de militantes et militants à 185. 50 des 185 assassinats ont été perpétrés au Brésil. Quant au Honduras, pour sa taille et celle de sa population, c’est le pays le plus meurtrier, avec 111 assassinats entre 2002 et 2014, toujours selon Global Witness.


Populations locales contre géants de l’industrie

C’est également au Honduras que militait Berta Cáceres, assassinée chez elle le 3 mars 2016 par des hommes armés alors qu’elle luttait contre un projet de centrale hydro-électrique. Berta Cáceres était et restera une figure emblématique de la lutte pour l’environnement et pour les droits de l’homme. Cette militante hondurienne était la fondatrice et la représentante du Conseil national d’organisations populaires et autochtones du Honduras. Régulièrement menacée à cause de son combat, la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme avait donné la consigne au gouvernement hondurien de la protéger, en vain. Les intérêts des industries et des autorités sont étroitement liés. Les gouvernements complices participent ainsi activement à la répression des militants et des militantes et c’est avec une totale impunité qu’ils agissent. Comme presque la moitié des personnes tuées pour leur lutte pour l’environnement et contre les grands projets capitalistes inutiles et destructeurs, Berta Cáceres était avant tout une autochtone du peuple Lenca, dont le territoire et la population était directement menacés par le projet de centrale hydro-électrique.

En effet, majoritairement, ces militants et militantes qui se font tuer sont d’abord des habitants des zones concernées par les projets des grandes industries. Celles-ci ne les consultent jamais avant d’investir et de dégrader leur environnement ; de mettre en danger leur écosystème et leur vie. Ceux et celles qui tentent de s’opposer à ces projets sont systématiquement réprimés et persécutés, jusqu’à mourir, sans qu’aucune justice ne soit faite. En France, le meurtre de Rémi Fraisse n’a toujours pas été reconnu alors que l’inutilité du barrage de Sivens a finalement été validée par la justice.

Déni de justice et responsabilités partagées

La collusion entre les grandes entreprises et les gouvernements est telle que la justice se place toujours et encore du côté de la répression des militants et des militantes, en Amérique latine comme en France avec Notre-Dame-des-Landes ou encore Bure. Les industries extractives et minières sont les premières responsables des projets qui mènent aux meurtres des populations locales et des militants s’y opposant. Comme en Guyane « française », ces projets polluent, détruisent l’écosystème et menacent l’avenir des populations de la région impactée.

Les méthodes de répression sont extrêmement violentes et s’opèrent dans une totale opacité. Global Witness signale d’ailleurs que les chiffres des assassinats sont probablement plus élevés. De nombreuses informations sont difficile à obtenir dans certaines régions parfois éloignées ou isolées au sein desquelles les peuples indigènes se battent. Au Brésil, c’est par exemple le contrôle du bois et les conflits autour de l’exploitation forestière qui est à l’origine des assassinats. L’industrie agro-alimentaire, qui contribue notamment à la déforestation en Amazonie, contribue également à ce macabre podium.

L’action des multinationales est pourtant contraire à la convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail sur les droits des peuples autochtones qui implique une consultation des populations locales avant toute mise en œuvre de projet. C’est pourtant librement qu’elles agissent. C’est également sans être inquiétées qu’elles poursuivent leurs projets alors que des militants et militantes sont tués, de plus en plus chaque année. Le chemin est donc encore long pour faire appliquer réellement leurs droits. Localement et internationalement, il existe des groupes de défense et de lutte pour les droits environnementaux. Cependant, alors que l’avenir de la planète s’assombrit encore plus avec l’annonce de la fusion Bayer-Monsanto,