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Gestion pro-patronale

Etat d’urgence sanitaire. RTT, durée du travail, repos : le gouvernement ouvre la voie à des attaques sociales

Présenté au Parlement à partir d’aujourd’hui, le « projet de loi d’urgence » vise à habiliter le gouvernement à légiférer par ordonnance dans des domaines divers et à déclarer un « état d’urgence sanitaire » Il permettra notamment de restreindre les libertés individuelles, mais aussi d'attaquer le droit du travail en étendant les pouvoirs des employeurs.

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Diffusé hier sur les réseaux, le « projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 » sera présenté aujourd’hui au Sénat et demain à l’Assemblée Nationale. Composé de 23 articles, le texte vise à permettre au gouvernement de légiférer par ordonnances dans un ensemble de domaines épars, sensés faciliter la gestion de la crise sanitaire : loi électorale, droits fondamentaux, droit du travail, droit de la sécurité sociale…

Outre le report du second tour des élections municipales au mois de juin prochain, le texte se structurent en deux parties : « l’état d’urgence sanitaire » et « mesures d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie ». Dans le premier volet, il s’agit pour le gouvernement d’instaurer un état d’exception pour au moins douze jours.

Celui-ci ouvrira au Premier Ministre la possibilité de prendre par décret « les mesures générales limitant la liberté d’aller et venir, la liberté d’entreprendre et la liberté de réunion et permettant de procéder aux réquisitions de tout biens et services nécessaires afin de lutter contre la catastrophe sanitaire. » En clair, une limitation des libertés individuelles qui, si elle est à relier à la politique de confinement du gouvernement, devra être surveillée de près pour éviter l’instrumentalisation répressive qui ne manquera pas d’en être faite par le gouvernement.

Le second volet contient un ensemble de mesures diverses, toujours dans la logique de permettre au gouvernement de légiférer par ordonnances dans divers domaines. En dehors des mesures concernant la prolongation de la validité des titres de séjour, l’intervention à distance de l’avocat en cas de garde-à-vue ou encore les modalités de validation des diplômes, la question économique est au cœur du texte. « Afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du virus Covid-19, et notamment de limiter les fermetures d’entreprises et les licenciements », le gouvernement pourra ainsi prendre des mesures d’aide aux entreprises et de modification du droit du travail.

Or sur ce plan, ce sont les droits des employeurs que le gouvernement entend clairement étendre, en phase avec sa gestion pro-patronale de la crise sanitaire. Ainsi, si le texte permet de « limiter les ruptures des contrats de travail, en facilitant et en renforçant le recours à l’activité partielle » c’est en « réduisant le reste à charge pour l’employeur », tandis que le gouvernement entend laisser la possibilité « aux entreprises de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la nation ou à la continuité de la vie économique et sociale de déroger de droit aux règles d’ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical » et, plus généralement, aux employeurs de « modifier les conditions d’acquisition de congés payés et permettre à l’employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates de prise d’une partie des congés payés, des jours de réduction du temps de travail et des jours de repos affectés sur le compte épargne-temps du salarié. »

Des mesures qui interrogent : quel rapport entre « l’acquisition de congés payés », acquis social fondamental, et la gestion de la catastrophe sanitaire ? Et pourquoi permettre aux employeurs, dans des secteurs qui ne sont pas « particulièrement nécessaires à la continuité de la vie économique », de « modifier unilatéralement les dates de prise d’une partie des congés payés », c’est-à-dire de refuser aux salariés la prise de congés payés à la date où ils le souhaitent ? Quant à la notion même de « secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la nation ou à la continuité de la vie économique et sociale », son flou interroge. Alors que les patrons se battent pour imposer l’idée que leur production serait « essentielle » et ne pourrait pas être arrêtée, le gouvernement pro-patronal ouvre la possibilité à tous les patrons de se revendiquer d’un tel statut pour mieux jouir de la possibilité de « déroger aux règles d’ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical ». En clair : d’attaquer les droits de leurs salariés !

Evidemment, les mesures prises par le gouvernement restent encadrées par un certain nombre de textes législatifs : Constitution, droit de l’Union Européenne, mais ils sont suffisamment larges pour admettre des attaques sociales d’envergure, par ordonnance. Surtout, aucune limitation ne serait prévue pour ces mesures d’exception. « Ces mesures concernant le champ social sont annoncées par le projet de loi comme devant être "provisoires", et ce "afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du virus Covid-19". Le texte ne prévoit pour autant pas de date limite. Elles resteront donc en vigueur même après la crise sanitaire, jusqu’à une période encore indéterminée. » note ainsi Etienne Girard dans Marianne.

Avec ce texte, et en dehors des mesures administratives inhérentes à la nécessité d’adapter le droit au fonctionnement particulier en période d’épidémie et de confinement, le gouvernement se dote de marges manœuvres en termes de limitation des libertés individuelles et étend les pouvoirs des employeurs. Un texte dans la continuité de la politique « pro-patronale » de gestion de la crise, qui donne tout soutien et tout pouvoir aux employeurs pour attaquer les droits des salariés, et appuie sans faille ceux qui exigent la continuité de la production au détriment de la santé des travailleurs.


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