Quand un syndicaliste partage son bureau avec le Medef, cela n’augure rien de bon

Jean-Claude Mailly avait déjà accueilli le président banquier et son gouvernement de droite avec une douceur inattendue de la part d’un dirigeant syndical. Il avait en effet félicité la ministre du Travail repêchée au CAC 40 pour « sa grande expérience », puis s’était réjoui de la nomination d’un membre du MEDEF (Antoine Foucher) à la direction du cabinet de la ministre (« c’est quelqu’un que je connais, qui aime la négociation collective »), pour enfin affirmer publiquement que légiférer par ordonnances n’était « pas un problème » si « on est d’accord sur le contenu » et qu’il y avait « des marges de manœuvre ». Tout cela constituait un bel appel du pied à l’exécutif (vous avez dit lèche-botte ?), qui vient d’être récompensé par le parachutage au gouvernement d’un ancien cadre important de la centrale syndicale, Stéphane Lardy, pressenti il y a un an pour être justement le successeur de Jean-Claude Mailly.

Celui-ci prendra donc place à la direction du cabinet ministériel avec Antoine Foucher. Membre du Parti Socialiste, Stéphane Lardy est considéré comme un « réformiste », c’est à dire prêt à accepter les réformes structurelles dont a besoin le patronat pour restaurer et augmenter ses profits sur le dos des travailleurs. Avec le MEDEF et le CAC 40 a ses côtés, il aura donc pour tâche d’élaborer et de mettre en œuvre la loi Travail 2 que nous prépare Macron, mais aussi la réforme de l’assurance chômage, de la formation professionnelle, ainsi que celle de la retraite que Macron souhaite lancer d’ici la fin de l’année. Bon programme pour un prétendu « syndicaliste »...

Un moyen pour mettre la pression sur la CGT ?

L’amabilité de Jean-Claude Mailly envers Macron et la nomination de Stéphane Lardy sont des signes d’un repositionnement de la centrale syndicale en faveur d’une collaboration plus forte avec le patronat. Après la mobilisation contre la loi Travail du printemps 2016 qui ne lui a pas bénéficié dans les urnes (FO a reculé, de 15,94% en 2013 à 15,59% en 2017), le syndicat s’oriente vers une politique plus ouverte de conciliation de classe. D’après Guy Groux, du centre de recherche de Sciences Po Paris, le Cevipof « On a le sentiment qu’il y a chez Mailly une envie de revenir dans un jeu contractuel plus classique et de faire concurrence à la CFDT ».

Une dynamique accueillie avec plaisir par le gouvernement de Macron et Philippe, qui espère ainsi accentuer la pression sur la CGT, en l’excluant d’un dialogue social auquel Martinez a par ailleurs ouvert la porte. Pour les travailleurs et travailleuses, une chose est sûre, ce n’est pas la présence d’un Stéphane Lardy au gouvernement qui doit nous rassurer sur la politique prévue par Macron, et les échanges fumeux de « bons procédés » entre direction syndicale et gouvernement pro-patronal ne présagent rien de bon !