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Défendre notre santé contre leurs profits

Alors que la semaine dernière les grèves se multipliaient en Italie pour obtenir l’arrêt de la production derrière le mot d’ordre : « nous ne sommes pas de la chair à canon », l’extension de l’épidémie et les annonces du gouvernement qui a fait fermer les commerces « non essentiels » depuis samedi soir génère de la contestation dans de nombreuses entreprises en France.

En effet, alors même qu’ils produisent des biens « non essentiels », voitures, trains, restauration rapide, … de nombreux ouvriers sont contraints de continuer à travailler malgré les risques qu’ils encourent. Après les droits de retrait chez Transdev pour exiger des moyens pour contrer l’épidémie dans les transports publics franciliens au début du mois, on a ainsi pu assister récemment à des droits de retrait dans l’automobile comme à PSA Mulhouse et Trémery, deux usines dont des salariés avaient contracté le coronavirus. Finalement, et sous la pression des travailleurs, le groupe PSA a annoncé ce matin l’arrêt de la production.

Du côté de Renault Sandouville, après le dépôt lundi d’un droit de retrait par la CGT et FO « pour danger grave et imminent », un CSE s’est tenu et a annoncé la fermeture de toutes les usines du groupe pour au moins une semaine. Une procédure similaire avait été lancée à Renault Cleon, où la CGT réclamait la fermeture de l’usine dès lundi. Comme l’expliquait Pascal Le Manach, secrétaire adjoint du syndicat CGT Renault « Comment concevoir sérieusement que l’on puisse participer au freinage du virus si les salariés du site continuent à s’entasser, à se changer dans les vestiaires, à manger et à travailler les uns sur les autres le jour, la nuit et le week-end ? ». Si les deux usines ont été arrêtées, Renault entend poursuivre l’activité dans la logistique (Cergy, Sofrastock) et à Lardy (essais moteurs), sous prétexte que des « moyens de prévention peuvent être mis en place » Un nouveau CSE est prévu demain.

A l’usine Bombardier de Crespin, face aux mesures très minimales et impossibles à respecter prises par la direction, le syndicat SUD a menacé la direction d’une procédure de danger grave imminent, et fini par obtenir l’arrêt de la production. Une victoire qui a donné des idées à d’autres travailleurs, comme à Toyota Onnaing, où un débrayage avait lieu hier après-midi dans l’atelier de peinture pour exiger un arrêt de la production, obtenu par la suite à l’issue d’un CSE extraordinaire tenu hier à 17h30 et qui a acté la fermeture de l’usine à partir de mercredi.

Une dynamique similaire à celle qui a pris en Italie et en Espagne, où les travailleurs d’entreprises telles que Fiat, Chrysler, Ikea ou Mercedes sont entrés en lutte derrière des slogans tels que « contre les patrons et le coronavirus » ou « la santé avant leurs profits », et ont obtenu l’arrêt de la production ou de meilleures conditions sanitaires.

Arrêt de la production : les intérimaires doivent être protégés

S’il faut célébrer la capacité des travailleurs à imposer la fermeture de leurs usines, même face à des entreprises multinationales, l’arrêt de la production pose une question brûlante, celle de la situation des intérimaires et des salariés des sous-traitants, dont l’activité est menacée par le chômage technique mis en place.

En effet, si les salariés des usines vont voir leurs revenus baisser à cause du chômage partiel - ce qui invite à exiger un chômage partiel rémunéré à 100% du salaire (part variable incluse), payée intégralement par le patron en prenant sur les profits – les intérimaires et salariés des sous-traitants risquent de perdre tout simplement leur emploi. Cela serait une attaques en règle contre l’ensemble du monde ouvrier, aussi l’interdiction des licenciement est-elle impérative. En effet, les syndicats ne peuvent se contenter de lutter pour défendre la santé des salariés en CDI, et doivent également revendiquer des mesures de chômage partiel à destination des intérimaires en exigeant le paiement de la totalité de leur salaire sans perte, ainsi que leur embauche et la ré-internalisation des activités sous-traitées.