Suite au discours d’Edouard Philippe qui a annoncé repousser l’application de la réforme des retraites aux personnes nées à partir de 1975 contre 1963 initialement prévu, la question du traitement des régimes spéciaux n’a pas été résolue, laissée aux négociations bilatérales. Pourtant, quelques heures après le discours, Matignon annonçait que la réforme s’appliquerait à partir de la génération 1985 pour les agents de régimes spéciaux dont l’âge légal de départ est de 52ans, tandis que pour ceux dont l’âge légal est de 57ans ce seront les générations à partir de 1980 qui seront concernées.

De fait, pour tenter d’enrayer le mouvement contre la réforme des retraites qui est dynamisé par les secteurs que constituent la SNCF, la RATP et l’Education Nationale, le gouvernement cherche à jouer sur les corporatismes pour proposer des conditions de sortie du régime spécial plus favorables à l’issue de négociations. Une volonté claire de briser le mouvement en agitant quelques concessions aux secteurs les plus mobilisés qui va à l’encontre de ce qui est porté par l’ensemble des grévistes : la revendication du retrait total de la réforme.

Pourtant, malgré le refus du corporatisme que revendiquent de nombreux grévistes, les syndicats de la SNCF ont accepté l’invitation à des négociations que leur a adressé le gouvernement. De son côté, si Sud-Rail s’est invitée ce matin, c’est pour y lire un communiqué intitulé "Pas de négociations sectorielles. Le retrait !". Le syndicat a quitté la table juste après.

Accepter de négocier conduirait nécessairement à affaiblir la mobilisation, en jouant le jeu de la division que veut alimenter le gouvernement. Et qui plus est en 2018, les négociations n’avaient permis d’aboutir à aucune avancée sur la réforme du Rail, de même que de nombreuses expériences de négociations antérieures. Ce n’est qu’en se mobilisant pour un retrait total d’une réforme ni amendable ni négociable que les travailleurs peuvent espérer remporter l’adhésion de la majorité de la population, étendre la grève et ainsi vaincre la réforme.

La majorité des grévistes le sait et le revendique, et contre les directions syndicales et leurs velléités de négociations, il faudra que ceux-ci s’organisent et se coordonnent à la base pour s’opposer à cette politique dangereuse.