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A l'ombre des grands médias

Soir de la marche pour Adama. « On aurait dit une zone de guerre, ça tirait de partout »

Ce samedi 22 juillet, à un an de la mort d'Adama Traoré aux mains des gendarmes, 2000 personnes ont défilé à Beaumont-sur-Oise pour continuer à exiger justice et vérité. Si de nombreux grands médias étaient présents à la conférence de presse et en début de manifestation, aucun d'entre eux ne relatera la répression policière insoutenable qui s'est déployée à Boyenval le soir même, telle une vengeance suite à une mobilisation exemplaire.

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Cette journée de commémoration de la mort d’Adama s’était déroulée dans une dignité poignante, avec une organisation impressionnante des habitants du quartier et des soutiens, soudée par une solidarité infaillible. Une solidarité qui n’enlève pas la souffrance engendrée par le meurtre d’un proche aux mains de la gendarmerie, cette institution d’Etat qui n’est pas là pour représenter les travailleurs, encore moins ceux des quartiers populaires. Une solidarité qui n’enlève rien à la colère et au profond dégoût générés par le traitement judiciaire de l’affaire et l’acharnement que subit la famille Traoré. Une solidarité indispensable pour poursuivre le combat et faire hommage à la mémoire d’un fils, d’un frère ou d’un ami qui a bel et bien était asphyxié par les policiers, comme l’a confirmé la contre-expertise début juillet, mettant à mal la version des forces de répression . Une solidarité et un combat qui sont autant de raisons pour garder la tête haute mais qui n’effacent pas la douleur. Le cri déchirant de la mère d’Adama avant de s’évanouir en tête de cortège étant là pour le rappeler, tout comme ces larmes d’un membre du staff d’encadrement de la manifestation.

Pourtant, la violence d’Etat ne semble pas connaître de limite. Après des semaines de répression accrue à Boyenval, c’est un nouveau torrent de répression policière qui s’est déversé gratuitement sur le quartier de la famille Traoré ce samedi soir, bien après le départ des médias et l’éparpillement des derniers soutiens. Pour que cette répression scandaleuse qui s’abat sur les quartiers populaires soit connue du plus grand monde malgré le silence assourdissant de la presse hexagonale, nous publions ci-dessous le témoignage accablant d’un proche de la famille Traoré qui participait à l’organisation de la journée de samedi.

« Les gendarmes nous ont laissé à peine le temps de ranger les tables, les chaises et tout le matériel utilisé pour l’hommage à Adama que le quartier était déjà bouclé, dès 21 heures. Ils se sont positionné devant le lycée et le Lidl, une dizaine de camions. Vers 22h, le drone de la gendarmerie survolait le terrain de foot où s’est déroulé l’hommage à Adama. On a vu les jeunes courir partout en criant « ils sont là, ils sont là ». Ils ont eu la « décence » de nous laisser finir de ranger avant de gazer le quartier.

C’était vers 23h-23h30. On avait déjà quitté le terrain de foot et on s’était installés devant chez un ami pour fumer la chicha et debriefer la journée. Certains se sont levés pour rentrer vite chez eux, d’autres sont partis déplacer leurs voitures. On est resté à 4, pensant que ça allait être comme la dernière fois, que les gendarmes allaient uniquement faire un défilé dans le quartier. Mais vers 0h30, on a vu la fumée des gaz lacrymogènes envahir le quartier, les yeux commençaient à piquer.

Puis on a entendu des explosions de mortiers provenant des deux entrées du quartier. On ne voyait pas grand-chose avec toute la fumée dégagée par les palets de lacrymogène, on avait l’impression qu’un brouillard était tombé sur le terrain de foot. En plus il n’y avait pas de vent donc la fumée stagnait et montait tout doucement au ciel. Un quart d’heure après, les gendarmes étaient à l’intérieur du quartier, tirant des grenades lacrymogènes tout en avançant. Les insultes venaient de partout...

À un moment a eu lieu une énorme explosion, les gendarmes ont arrêté leur progression et tout à coup c’était la guerre et je pèse mes mots, c’était vraiment la guerre ! On n’entendait que d’énormes détonations, on ne voyait rien, ça explosait partout, on était secoué par les déflagrations, par le souffle des explosions successives, c’était impressionnant ! Ça n’a duré qu’un quart d’heure maximum mais d’une extrême violence. Grenades lacrymogènes et de désencerclement du côté de la gendarmerie, mortiers du côté des jeunes… ça tirait de partout, il y’avait une grosse puissance de frappe. On avait l’impression que c’était une zone de guerre.

On a eu très peur. Je pense qu’on aurait dû faire comme les autres et vite rentrer chez soi aux premiers jets de lacrymogènes. Une fois que ça s’est calmé, les gendarmes sont restés à 10 camions dans le quartier jusqu’à 4 heures du matin. Le dimanche matin, le quartier était très calme et surtout désert...

Ca faisait plusieurs jours que la pression montait en vue de la marche. Six jeunes du quartier, mineurs, avaient même été emprisonnés deux jours avant la marche. Ils n’ont été relâchés que samedi vers 18 heures. Mais malgré cette répression préalable, la marche a quand même eu lieu, donc ça n’a pas dû plaire. La répression dans les quartiers n’a jamais cessé depuis des décennies mais c’est un peu plus chaud depuis quelques temps, c’est de plus en plus grave. On sent que les injustices sont plus fréquentes et l’impunité policière toujours aussi révoltante. »


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